Souriez, vous êtes rééduqués!

Entre militantisme LGBTQIA+, odes à Zelensky et apologie du wokisme, nos con-frères-sœurs-x, enfin nos collègues quoi, ne manquent jamais de beaucoup nous fasciner par leur audace. Leur dernier combat, en faveur de l’interprétation de La Petite Sirène par une actrice afro-américaine, mérite quelques lauriers. «Une Ariel noire vous pose problème, vous êtes raciste!», assène une collaboratrice de «l’Investigative Lab» (c’est le nom qu’ils donnent à leur rédaction, d’ailleurs fort peu métissée). Et l’argumentation de l’autrice du papier ne manque pas de sel: ainsi, parce que Hans Christian Andersen était vraisemblablement homosexuel, réclamer une Ariel conforme à la vision de son auteur n’aurait pas de sens, puisqu’il faudrait dès lors la représenter sous la forme d’un mâle gay. «Cela fait trop longtemps qu’on nous gave avec des princesses blanches auxquelles les petites filles métisses, noires et les autres ne peuvent pas s’identifier», poursuit notre passionaria des causes gagnées d’avance. Une argumentation délicieuse de la part de celle qui, par ailleurs, nous encourage à ne pas attacher la moindre importance à la couleur de peau des personnages!
Il y a plusieurs choses dont, au Peuple, nous ne nous soucions guère: l’épiderme des gens, la sexualité des écrivains et les leçons de morale de jeunes décérébrés, fussent-ils munis d’une carte de presse.

On veut sa retraite à 90 ans!

DR

C’est l’une des stars de cette édition et elle le mérite bien. Quand elle ne compare pas les élus à des tortionnaires nazis, Franziska
Meinherz est en effet capable de poser des questions cruciales. Ainsi, à l’annonce de la fin de carrière d’un ambassadeur de la 5G nommé Roger Federer, l’élue d’extrême-gauche lausannoise s’est fendue d’un message sur les réseaux sociaux demandant pourquoi elle devrait bosser jusqu’à 65 ans, contre 41 ans pour le génie de la balle jaune.
Nous avons la réponse: pour nous faire rêver le plus longtemps possible.

La foire à la saucisse

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Une bonne vieille grève du sexe pour faire les pieds (de porc) aux mangeurs de viande. Voilà la nouvelle proposition de l’organisation PETA, censée défendre les droits des animaux, pour faire face à… on ne sait pas, en fait. Disons pour faire face à la présence du mal dans le monde, pour faire simple. Car les méchants, ceux qui polluent, ont tous un truc en commun: ils aiment les saucisses! Et la PETA allemande d’enfoncer le clou à propos des bienfaits de la chasteté forcée pour les viandards: non seulement elle fera beaucoup souffrir les hétéro-beaufs, mais elle sauvera aussi la planète en économisant 58,6 tonnes de CO2 par an grâce à chaque enfant qui ne naîtra pas. Supprimons le sexe, la viande et les enfants, et le paradis, enfin, reviendra sur terre! La proposition aura au moins ceci de positif qu’elle évitera peut-être que des membres de la PETA se reproduisent.

La blanche colombe est revenue

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A intervalles réguliers, la francophonie ébahie voit le philosophe (paraît-il) Bernard-Henri Lévy revenir d’un pays en guerre et appeler à ne rien lâcher. Et c’est précieux, car en général, celui qui n’a pas de grandes conceptions géopolitiques peut se servir de la geste du seigneur germanopratin comme boussole pour basculer dans le camp opposé. Cette fois, c’est d’Ukraine que revient notre héros, où il lui a semblé bon de se faire prendre en photo sur une multitude de champs de bataille, la chemise impeccablement blanche et le brushing à l’avenant. Et gageons que les combats n’y étaient pas particulièrement intenses, puisqu’il a survécu. A moins que les Russes aient compris qu’être attaqués par pareille baudruche était tout de même plus agréable que la lecture de ses livres.




La décroissance malheureuse

«Tout de même, avons-nous entendu à propos de notre dernier numéro, n’y avait-il pas sujet plus sérieux à mettre en Une qu’une pâtisserie lausannoise qui vend des gaufres en forme de pénis?». Ou alors, à propos des feux du 1er Août, «est-ce bien là le cœur de la célébration?». Nul doute que cette fois encore, d’aucuns nous reprocheront de consacrer trop d’importance à la décision des chaînes de magasins de bannir les illuminations de Noël, «pénurie oblige», au lendemain à peine des recommandations de Berne.
«Covid oblige», «écologie oblige», «pénurie oblige»… Telles sont les ritournelles que l’on nous sert désormais pour accompagner chaque nouveau rognage de nos libertés. On ne nous fait plus miroiter la «sobriété heureuse», inaccessible aux médiocres, mais on nous sert le malheur responsable. Et si nous haussons les épaules, si nous n’exultons pas lorsqu’on nous présente nos nouvelles servitudes sous la forme de «challenges», c’est qu’un «effort de pédagogie» reste à accomplir du côté de nos bons maîtres.
On a pu lire beaucoup de choses, à propos du journal que vous lisez. Par des rapprochements pas si subtils, certains ont même tenté de nous faire passer – et rien ne pourrait être plus éloigné de la réalité – pour des hommes d’ordre. Des excités rêvant d’États forts qui penseraient à notre place, même! La réalité est que nous vivons très douloureusement non pas la fin d’une ère d’abondance, mais la mort progressive de nos libertés. Alors il n’y aura plus d’illuminations dans les magasins à Noël: à vrai dire, nous n’y tenions pas, n’ayant pas encore délégué à la grande distribution la charge de maintenir vivante notre identité. Mais une fois de plus, comment ne pas constater que ce sont toujours les vestiges de notre folklore qui, les premiers, doivent s’effacer devant le monde qui vient? Nous qui ne nous sommes pas encore soumis à la «discipline grégaire», comme disait Bernanos, nous pouvons encore le déplorer. Mais ceux pour qui la naissance d’un Dieu sauveur équivaut à la naissance d’un monstre de spaghetti volant (si, si, ça existe), au nom de quoi se révolteront-ils en fin d’année?
Pasolini avait écrit une très belle lamentation: il disait qu’il pleurait un monde mort, mais que ce faisant, lui n’était pas mort. Notre révolte, la seule qui nous anime, vise à maintenir notre dignité de citoyens face au totalitarisme qui s’installe sous nos yeux. Et à le combattre même quand il sévit avec d’excellents prétextes.




La grillade, ce truc de mecs

On l’a présentée comme une radicale, une gaffeuse, voire une cinglée. Pourtant, en affirmant la réalité d’un lien entre goût pour le bœuf grillé et masculinité triomphante, l’économiste et femme politique Sandrine Rousseau n’a rien fait d’autre que répéter un point doctrinal courant au sein des courants écoféministes.

Porte-parole de l’association PEA – Pour l’Égalité Animale, Pia Shazar le confirme sur deux questions clés:

Existe-t-il un lien entre culte de la virilité et consommation de viande?
Oui, nous partageons le constat des liens clairs et avérés entre viande et virilisme. C’est une évidence que le barbecue est un symbole de virilité, comme l’attestent les analyses des publicités faites par exemple par Carol Adams ou Axelle Playoust-Braure. Les études montrent également que les hommes consomment beaucoup plus de viande que les femmes ou encore que la population végétarienne est majoritairement féminine.

De façon générale, l’on voit également une tendance plus réactionnaire chez les hommes que chez les femmes lorsqu’il s’agit du traitement de la question animale en politique. Les sondages au sujet des prochaines votations contre l’élevage intensif en sont un bon exemple puisqu’ils démontrent que 64% des femmes interrogées seraient favorables à cette initiative, contre seulement 44% des hommes. On peut lire ces chiffres de différentes manières. Une chose est sûre, l’animalisme a été historiquement et majoritairement porté par des femmes, et selon nous, il n’y a pas de hasard, mais une condition commune, une cause commune entre individus considérés de second rang.

Un barbecue féministe est-il possible, à vos yeux?

L’idée d’un barbecue féministe semble alors absurde et contradictoire. La consommation de viande a quelque chose à voir avec le virilisme et donc avec une forme de sexisme dans la mesure où il consiste en une chosification des corps que l’on s’approprie et que l’on consomme.
La proximité avec la façon dont notre société sexiste traite et (dé)considère les corps des femmes est ainsi flagrante. Manger quelqu’un est un acte d’une violence innommable, c’est traiter l’autre comme moins qu’un objet, c’est asseoir sa domination, c’est faire sien et tuer l’autre, c’est faire fi du consentement. Manger quelqu’un, en somme, semble bien loin de toute interprétation des valeurs féministes.
Ce n’est donc probablement pas un hasard non plus que les hommes se sentent menacés par l’antispécisme ou le véganisme, c’est que cette idéologie et cette pratique bousculent des logiques suprémacistes qui se sont construites à leur bénéfice, c’est que ça vient les remettre à leur place; c’est à dire, à égalité. Et ça, bien des hommes, n’en veulent manifestement pas.

Commentaire

Parfaitement libres, nous ne détestons pas non plus les contre-pieds, au Peuple. Pas au point, cependant, de présenter l’ineffable Sandrine Rousseau comme un phare de la pensée contemporaine. Mais plus que ses propos sur la viande, c’est surtout son souhait, exprimé au début du mois, d’inventer des délits pour non-respect des tâches ménagères qui nous pétrifie. Voici une femme, intelligente à l’évidence, qui se targue de venir fliquer nos vies privées et, en particulier, la manière dont les uns et les autres se répartissent les responsabilités logistiques. Un tel projet semble autrement plus inquiétant que l’idée, qui se constate aisément dans la vie de tous les jours, selon laquelle les hommes seraient plus carnassiers que les dames. Il faut n’avoir jamais participé à un giron ou à une soirée entre amis pour constater la répartition genrée des fonctions alimentaires.
Dans ses réponses à nos questions, l’association PEA – Pour l’Égalité Animale, explique d’ailleurs avec des arguments valables que ce lien n’est pas fantasmé, mais résulte d’une construction sociale. La question n’est donc pas de remettre en cause la rigueur intellectuelle de ceux qui s’opposent à la consommation de viande, ou à l’élevage intensif, mais de savoir si le monde labellisé sans souffrance qu’ils nous promettent ne sera pas pire que celui qu’ils veulent effacer. Il est peut-être des constructions et des normes sociales qui répondent à des nécessités. Il est peut-être des réalités économiques qui ne cochent pas toutes les cases du paradis sur terre, mais qui permettent à la population de se nourrir sans se ruiner intégralement. Que les femmes fassent davantage la salade que les hommes est un enjeu qui paraît tout de même bien anodin alors que l’inflation explose et torture les familles.




Hommage à une grande reine

(Extrait issu de la newsletter personnelle de Raphaël Pomey)
[…] Je ne vais pas tartiner sur son héroïsme, sur sa descendance pas toujours très digne, mais plutôt sur ce qu’elle incarnait en termes de continuité historique. Il y a en effet quelque chose de réjouissant à voir tous les démolisseurs, déconstructeurs et rebelles d’état forcés de s’incliner devant le souvenir de la grande dame, restée farouchement fidèle à la tradition de son sang et de son rang. Cette reine, chrétienne, était l’antithèse vivante du foutoir égalitaire, des «valeurs de la République» et du nouveau management des peuples.

J’ai peu regardé les émissions hommages consécutives à son décès. Mais je peux vous en faire un résumé: une femme d’un autre temps, l’occasion de dépoussiérer le fonctionnement de la famille royale et un nouveau roi, certes un peu gauche, mais qui a une réjouissante fibre écolo. Voilà. J’ai tenu cinq minutes devant ces foutaises et cette arrogance. Cela paraît peu mais j’ai quand même encaissé l’intervention d’un prof de littérature qui reprochait à la nouvelle première ministre anglaise d’avoir loué les vertus unificatrices de la reine, «tandis que le parti de Madame Liz Truss ne fait rien pour la grande majorité de la population». Ce serait dommage de ne pas utiliser un deuil pour pousser un peu son agenda de sangsue à subventions. […] La mort de la reine ne m’affecte pas. Je n’ai pas envie d’écouter le God Save The Queen des Sex Pistols ou de faire semblant de ne plus trouver de sens à ma vie parce qu’une vieille dame a rendu l’âme à Dieu. Je ne la connaissais que par écran interposé et elle n’était point de mon peuple. Mais avec elle, c’est une certaine idée d’un stoïcisme européen qui s’en va, et une discipline personnelle qui jurait délicieusement avec le règne larmoyant des Aurélien Barrau, du prince Harry ou des apologètes de la sous-culture woke.

Nommer, deux jours avant son décès, la nouvelle locataire du Downing Street est l’ultime acte de bravoure d’une dame qui représentait ce que notre civilisation a de meilleur. C’est aussi, d’une certaine manière, un pied de nez (on ne fait pas de doigts chez ces gens-là) à la déliquescence des mœurs modernes, à notre fragilité et à notre inconséquence. En ceci, la reine Elizabeth II sera, pour toujours, infiniment plus rebelle que les grotesques boomeurs qui lui vomissaient dessus dans leurs hymnes punks.
La reine est entrée dans l’éternité de Dieu. Puisse-t-elle prier pour nous, que son souvenir nous prémunisse d’entrer dans l’éternité des baudruches.
Vive la reine.




«Ielles» mangent comme des cochons

Pas grave puisque nous sommes toujours là pour servir. Alors pour aller vite, il s’agit d’un programme qui, sans doute avec le graphisme le plus moche du monde, met en scène une petite truie qui aime se rouler dans la boue avec l’enthousiasme d’un militant «woke» devant une nouvelle norme à déconstruire. «Déconstruire» les repères sociétaux, la série s’y emploie d’ailleurs avec une belle énergie puisqu’à la suite d’une pétition, le premier couple homoparental y a été introduit dans un épisode de sa septième saison. En l’occurrence, c’est une oursonne polaire qui présente sa famille arc-en-ciel à ses amis. Le tout avec un texte très fort: «Je vis avec ma maman et mon autre maman». Alors, n’étant pas spécialistes du programme, nous n’allons pas nous lancer dans une longue exégèse. Deux remarques, toutefois: tout d’abord, il y a tout de même de quoi être vexée quand on devient, devant les amis de sa descendance, «l’autre maman». Sans doute là une nouvelle discrimination à combattre dans un prochain épisode. Et surtout: on ne voit que des glucides sur la table du repas familial, et point de protéines. Pas idéal pour le développement musculaire de l’enfant, mais voilà ce qui arrive quand – n’en déplaise à la députée française Sandrine Rousseau – on a chassé tous les mâles susceptibles de faire cuire les entrecôtes.

La tiers-mondisation a du bon

Voilà une dame, brillante, polyglotte, musicienne, qui a essentiellement dirigé des fondations avant d’arriver à l’Everest politique que l’on connaît.

Pauvre Simonetta Sommaruga. Pas un jour qui passe sans que de bons gros bourrins de droite jouent aux babouins à propos de son plan pour bien passer l’hiver. Parce que voyez-vous, la socialiste a eu l’audace suprême, dans les colonnes de Blick, d’affirmer qu’elle buvait du thé chaud et portait des pulls… (bravo, vous avez bien anticipé) chauds, l’hiver. Alors que la population doit «faire des sacrifices», ce genre de recommandations passent modérément bien. Et pourtant, il y a de quoi se réjouir: voilà une dame, brillante, polyglotte, musicienne, qui a essentiellement dirigé des fondations avant d’arriver à l’Everest politique que l’on connaît (et où il fait si froid). Quelqu’un de précieux pour la démocratie, donc, mais qui n’a jamais eu pour fonction de produire de la richesse. Gageons qu’après une carrière si admirable, la découverte prochaine du négoce de lapsang souchong et de pulls en poils d’alpagas lui feront quitter les rivages de l’autoritarisme économique cher à son parti.

La neutralité neutralisée

«Toutes ces options sont compatibles avec la neutralité de la Suisse», jure la Conseillère fédérale Viola Amherd

La Suisse doit se rapprocher de ses voisins pour assurer sa sécurité. C’est ce qu’annonce un rapport complémentaire du Conseil fédéral, qui prône l’intensification du partenariat» – en langage clair, la soumission – avec l’Otan. Mais puisque nos bons maîtres aiment les cache-sexes, à part de temps en temps sous un bureau ovale, réjouissons-nous: «Toutes ces options sont compatibles avec la neutralité de la Suisse», jure la Conseillère fédérale Viola Amherd. On n’en doutait pas, et l’émotion nous gagne rien qu’en imaginant nos recrues aller lâcher des bombes en toute neutralité sur les gens que nous sanctionnons déjà économiquement de façon impartiale.

Loup y es-tu?

Naia Okami est une femme transgenre – donc biologiquement un homme – qui s’identifie à un loup de Colombie-Britannique

Honnêtement, nous voulions une photo d’animal pour boucler cette page. En France, il y avait cette histoire de gens qui souhaitent interdire les balades à dos d’ânes pour les enfants, qui nous séduisait. Mais, plus classiquement, nous avons décidé de nous rabattre sur une femme transgenre – donc biologiquement un homme – qui s’identifie à un loup de Colombie-Britannique, et parfois aussi à un renard roux. Une particularité qui la fait appartenir à une nouvelle minorité, celle des thérianes, qui n’attendra pas bien longtemps avant de réclamer de nouveaux droits absurdes. Ce canidé transgenre répondant au doux nom de Naia Okami fait un peu parler de lui ces derniers jours, avec un passage remarqué dans une émission à sa gloire. Nous profitons de sa gloire momentanée pour nous adresser à l’animal afin de l’inviter à éviter les montagnes valaisannes.




Souriez, vous êtes forcés!

Dans un article détaillé sur les solutions du Conseil fédéral pour favoriser les économies d’énergie, 24 heures nous apprend que Berne, désormais, va hausser le ton en profitant d’une « union nationale ».

Extrait de Une:

Le volontarisme obligatoire, résumé par 24 heures.

Enlevez-moi ces guirlandes!

La carotte, ce sont des mesures volontaires comme l’extinction complète de la télé, la baisse du chauffage, bien fermer le congélateur, etc. Rien de bien méchant, jusque-là, à cela près que toute une série de poncifs médiatico-politiques viennent saupoudrer ce sabir technocratique. Ainsi, la petite citation du Conseiller d’état valaisan Roberto Schmidt, qui nous apprend qu’en matière d’économie d’énergie, comme en situation de Covid, mieux vaut éviter « les règles différentes entre les Cantons ». On semble s’y habituer avec un beau fatalisme, mais il reste étonnant comment chaque crise vient montrer les sempiternelles « limites du fédéralisme ». Harmonisation, toute! Autres victimes toutes trouvées, les illuminations de Noël dans les bâtiments, bien sûr, en ligne de mire de l’Union des villes suisses. Pas de feux du premier août pour la sécheresse, pas de sapins pour les énergies ! Il est pas beau, le progrès !

Qui viendra vérifier la température de mon bain?

Mais il ne s’agit pas de contester ici chacune des mesures proposées. Après tout, la pénurie menace et un Gouvernement doit bien prendre des mesures. On n’en demeure pas moins terrifiés par les solutions qu’il propose au cas où le volontarisme ne suffirait pas. La limitation du chauffage à 19 degrés, par exemple, qui pourrait également concerner les logements : et si je n’ai pas envie d’ouvrir ma porte à un fonctionnaire ? Et quid, également, de l’eau chaude limitée à 60 degrés : finies mes cafetières italiennes ? Devrai-je inviter des inconnus dans ma salle de bain pour vérifier si j’ai le droit ou non de soigner mon rhume dans la baignoire ? 

On le voit, le « bâton » s’inscrit tout de même assez furieusement dans la continuité de la gestion de crise du Covid. Un problème réel, mais auquel on veut immédiatement répondre par un autoritarisme déguisé. On travaille sur une base volontaire, promis, mais si vous n’êtes pas volontaire, votre vie sera un enfer.

On appelle ça la stratégie de la carotte et du bâton. Mais ce sont les ânes que l’on dirige ainsi, pas les citoyens d’un pays libre.




Effondrement

Au premier rang de ces derniers, la tension permanente entre la liberté et la morale. Parmi les plus réfractaires à l’omniprésence d’annonces dans la rue, nombreux sont ceux qui réclamaient leur droit à la «décolonisation de leur imaginaire». Une liberté contre une autre, pourrait-on dire. Ce type de revendications justifie en effet, depuis des années, la lutte engagée par Lausanne, puis plus récemment par le canton de Vaud dans son ensemble, contre la publicité sexiste.
Depuis deux semaines, sans qu’aucun imaginaire soit visiblement colonisé, il est possible d’acheter à Lausanne des gaufres en forme d’organes génitaux dans une échoppe spécialisée. Qu’une adolescente gobe une sucrerie en forme de pénis ou qu’un garçon en pleine mue dévore un simili-vagin fluo, la presse unanime crie désormais au progrès. Dans l’un des nombreux reportages extatiques de nos confrères, de La Télé en l’occurrence, il nous a même été donné de découvrir une cliente jugeant que «c’est maintenant ou jamais» qu’il fallait faire ce genre de choses, tandis que son ami y voyait une occasion tombée du ciel d’«en finir avec les tabous autour des pénis et des vulves». Étranges tabous que ceux dont la classe médiatique est unanime à saluer la disparition sous prétexte d’une énième libération à mener.

Nous l’avons déjà dit, au Peuple, nous n’aimons pas beaucoup l’inflation juridique et, donc, étatique. Il n’en reste pas moins que les lois approuvées par la population ou ses représentants doivent être appliquées lorsqu’elles existent. Se pose donc la question du sort à réserver à un commerce qui, de façon assez évidente, contredit un règlement lausannois – le Règlement général de police – censé protéger «la décence». Bien sûr, on nous dira que cette notion évolue avec les mœurs. Reste qu’à moins d’admettre la réalité de l’épuisement civilisationnel en cours, on ne voit pas quelle vision du sacro-saint «vivre-ensemble» peut encore être respectée quand la transgression devient la norme.




Au boulot mesdames!

Ces riches recommandations accompagnaient, dans un entretien à la NZZ am Sonntag, un message de soutien au relèvement de l’âge de la retraite des femmes, sur lequel la population s’exprimera le 25 septembre prochain. Travaillez plus, et plus longtemps, et le bonheur vous ouvrira les bras entre la fin du boulot et les plats prémâchés de l’EMS! A moins de faire un cancer entre-temps.
Alors on ne va pas jouer la lutte des classes quand on aspire essentiellement à boire des bières fraîches sur une plage de Thaïlande, à l’approche du troisième âge. Gageons cependant qu’il est relativement agréable de travailler à 70% quand on passe d’une carrière de haute fonctionnaire à une carrière de directrice de Pro Senectute, comme la Grisonne. Quand on traîne une épicondylite depuis vingt ans, parquée à la caisse d’un grand magasin, c’est parfois plus délicat. Surtout, on comprend mal de quel libéralisme la native de Felsberg se fait l’apôtre. Certainement pas le nôtre, tant le fait de se terrer dans une cabane près d’un lac, comme jadis Henry David Thoreau, nous paraît un destin plus enviable que la soumission aux injonctions de quelque politicien de carrière.

La fraction de seconde de trop

Depuis quelques semaines, difficile d’y échapper: des panneaux en langue inclusive nous invitent, à travers la Suisse romande, à ne pas écraser les «ÉCOLIER-RES». Heureusement, d’ailleurs, parce que sans mention explicite des élèves de sexe féminin, les chauffards avaient la fâcheuse tendance de choisir leurs victimes en fonction de leur sexe… Désormais, plus d’excuse, donc, et tant pis si les automobilistes peu familiers de la novlangue perdent des fractions de secondes précieuses à tenter de déchiffrer ce sabir abscons: au moins ils seront dangereux pour la bonne cause.

La fin de l’abondance s’annonce sympathique

La France est ce beau pays dont le président peut annoncer les mois difficiles à venir, tandis que lui-même fait le zouave sur un jet-ski. Alors pas de haine du succès dans nos rangs: tant mieux si Jupiter peut se détendre entre deux téléphones durant ses vacances. Après tout, un président aussi a le droit de s’amuser. On ne comprend juste pas ce désir de faire ça au milieu de la mer, alors qu’il y a des programmes d’occupation si rigolos (voir ci-dessous) dans les prisons de l’Hexagone.

Dans les prisons de Fresnes, l’ann didou didou d’ann

Les amateurs de chansons bretonnes se souviennent sans doute qu’il fallut jadis une «jeunette» pour délier les pieds d’un prisonnier «dans les prisons de Nantes». Dans celles de Fresnes, c’est plus simple: un «moment d’engagement fraternel» (dixit le directeur des lieux, Jimmy Delliste) suffit. Cet été, la France ébahie a ainsi eu l’occasion de découvrir «Kohlantess», un «Koh-Lanta des cités», organisé entre quatre murs. Au menu de cette déclinaison de la fameuse émission de télé-réalité de TF1, des épreuves comme le karting, le mime ou le tir à la corde au-dessus d’une piscine. Le tout, au lendemain d’une pièce de théâtre mettant en scène le rappeur Stomy Bugsy, qui en son temps prônait le «sacrifice de poulets».
Mais pas de mauvais esprit: le karting pour la réinsertion, pourquoi pas, après tout. On pourrait même imaginer qu’une visite au Grand Prix de Monaco transformerait tout ce joli monde en citoyens modèles. L’ann didou didou d’ann…




Qui pour défendre nos libertés?

Les âmes, après vingt siècles d’oppression judéo-chrétienne, allaient se trouver enfin libérées, les appartenances ethniques allaient être oubliées, l’égalité conquise. Le monde, sorti de l’histoire, devait ressembler à une curieuse fusion de roman d’Alexandre Jardin et de chanson de Yannick Noah. Bien sûr, la rapide marche vers le paradis sur terre a parfois connu des coups d’arrêt, au Cambodge comme en ex-Yougoslavie. Reste que jusqu’à ces dernières années, il fallait être très mal luné, voire une cassandre de la pire espèce, pour annoncer des lendemains qui ne ressembleraient pas à la description d’Imagine, l’épouvantable balade de John Lennon que nous apprenions religieusement à l’école.

Lorsqu’en fin d’édition, au Peuple, nous effectuons un survol de nos différents articles, nous devons souvent constater que nous en revenons à une question essentielle, déclinée de façon multiple: celle des dangers qui planent au-dessus de notre liberté. Non pas la liberté de l’ado incapable de comprendre qu’en période de crise, la population peut elle aussi être amenée à fournir des efforts, mais la liberté, la vraie. Celle qui implique qu’aucun inquisiteur à la petite semaine n’ira fouiller dans nos factures pour voir si nous avons oublié d’éteindre une ampoule un soir, ou choisir pour nous les chansons que nous avons le droit de chanter sur scène. Deux exemples, mais nous aurions pu en choisir d’autres, issus de ce numéro.

Au moment où vous lirez cet édito, le 1er août aura tout juste passé. Nous aurons fêté notre indépendance et cette suissitude, à la fois discrète et si fondamentale, qui nous rassemble. Notre pays a été formé par des hommes qui désiraient vivre librement, et qui auraient accueilli à coups de fourche des donneurs de leçons venus leur dire comment dépenser l’argent du ménage. Alors qu’aujourd’hui, une apparente quête de «responsabilité» fait ressurgir les pires souvenirs des totalitarismes passés, avec l’aval de personnes que nous avons pourtant élues pour nous défendre, peut-être n’est-il pas si bête de nous souvenir que nous aussi devons aspirer à rester des citoyens plutôt que des sujets.




BHL s’est coupé les cheveux

Le glamour, malheureusement, survit difficilement au poids des années. Aussi la bien-pensance devait-elle se trouver de nouveaux héros. Ce sera Zelensky, le président en treillis de l’Ukraine martyrisée, et son épouse Elena. La semaine dernière, des photos de la légendaire Annie Leibovitz sont apparues sur les réseaux, prises pour le magazine Vogue. Glamours au possible, elles nous montrent le couple tendrement enlacé à la façon de Jack et Rose sur le ponton du Titanic de James Cameron. Et là, malheureusement, les qualités esthétiques indéniables des clichés ne suffisent pas à dissiper un certain malaise. Voici un homme qui n’a de cesse de demander des sous, des armes et des soldats au monde entier, mais qui de son côté se livre à des mises en scène théâtrales et romantiques pour un média consacré à la mode. Quelque chose cloche, à l’évidence, et ce ne sont pas les réfugiés que nous avons parfois vus traverser nos villes l’air hagard qui nous contrediront.