Du sang neuf contre les dépendances

Elle a connu ses heures de gloire entre le début des années 2000 et le milieu de la décennie dernière. Farouchement opposée à toute tentative de dépénalisation du cannabis et toute forme de «banalisation» du problème, l’Association Romande Contre la Drogue (ARCD) était alors un interlocuteur incontournable lorsqu’il était question de révision de la loi sur les stupéfiants ou d’ouverture de locaux de consommation sécurisés.

Dix ans plus tard, le tableau semble bien sombre pour ces militants, généralement issus des rangs conservateurs, mais dont les statuts soulignent l’engagement apolitique et non confessionnel. Non seulement des « essais pilotes » de vente de cannabis sont menés dans diverses villes de Suisse, et bientôt à Lausanne avec un produit « bio » et « local », mais le discours très moral, longtemps prisé par l’ARCD, ne semble plus guère avoir de prise sur une société qui s’éloigne des valeurs traditionnelles. Si bien que les seuls interlocuteurs des médias concernant les questions de lutte contre les addictions sont des organismes qui, selon l’ARCD, jugent comme des fatalités des problématiques qu’ils devraient tenter de faire disparaître.

« J’ai été patrouilleur pendant plus de vingt ans, j’ai vu la misère humaine. »

Claude Reymond, membre de l’ARCD

C’est pourtant dans ce contexte délicat que l’association veut miser sur une nouvelle impulsion. Aux commandes, un étudiant en relations internationales de 24 ans, Dan Ziehli, président ad intérim depuis plusieurs mois et qui devrait être confirmé dans ses fonctions à l’automne, selon toute vraisemblance. A ses côtés, différentes personnalités actives en politique, principalement à droite, mais aussi un officier de police: Claude Reymond, par ailleurs engagé à l’UDC. Loin des discours purement idéologiques, ce dernier entend apporter son expérience de terrain à Genève. Une ville récemment touchée par une vague de crack qui a même conduit à la fermeture d’un préau. «J’ai été patrouilleur pendant plus de vingt ans, j’ai vu la misère humaine», décrit le policier. Qui ajoute: «La consommation de drogue commence de plus en plus tôt avec des produits de plus en plus forts ».

Refait à neuf, le site Web de l’association conserve un ton très opposé à la banalisation des drogues dites douces. Arcd

Contre l’idéologie «progressiste»

«Nos positions restent les mêmes, nos principes aussi, mais nous devons adapter notre message à une nouvelle génération», juge le président du PLR d’Yverdon-les-Bains, Maximilien Bernhard, présent depuis le début de l’aventure de l’ARCD. Signe de cette modernisation du discours, un site Web récemment refait à neuf, et un accent désormais placé sur le degré d’efficacité des mesures, et non plus sur leurs implications morales. Plus question d’«effondrement de la société», donc, mais un discours sans compromis, y compris sur le cannabis thérapeutique et, même, le CBD, pourtant légalement en vente. «Nous assumons d’être à contre-courant», rétorque Dan Ziehli, qui voit dans la mise à disposition de ces produits «le cheval de Troie de la légalisation». Il se défend toutefois de vouloir attaquer les personnes toxicodépendantes. «Nous avons simplement le sentiment que les associations «de référence» sont dans l’euphémisation et l’idéologie progressiste, alors que nous voulons parler des faits». Et de citer la hausse des accidents mortels de la circulation dans telle ou telle région marquée par la légalisation du cannabis, ainsi que tous les pays qui font marche arrière après des années d’expérimentation de la «tolérance». Des informations que la nouvelle figure de proue de l’ARCD aime à sourcer, étayant à peu près chacune de ses affirmations par la mention d’une étude correspondante. Sans être lui-même étudiant ou professionnel du domaine, le Vaudois est notamment féru des communications de l’Académie nationale française de médecine.
«Loin de l’idéologie» ou non, le contact sera difficile à rétablir avec les autres acteurs de la lutte contre les dépendances, comme le confirme le directeur adjoint d’Addiction Suisse, Frank Zobel: «Nous parlons avec tout le monde mais l’expérience a montré que le dialogue avec les membres de ce type d’associations est pour le moins difficile. Ils ont raison et nous tort, et les évidences que nous récoltons avec nos travaux scientifiques sont souvent considérées comme des mensonges, sauf si elles peuvent être utilisées pour confirmer leurs propres thèses. Pour entamer un dialogue, il faut être d’accord de se remettre en question, ce qui, sur la base de nos expériences, est rarement le cas avec des associations qui représentent avant tout des valeurs et une vision du monde qui n’admettent pas la nuance. Or, la nuance, la complexité et le doute sont au cœur de notre travail.»

Une pique qui n’ébranle pas Dan Ziehli, pour qui la légalisation aussi peut devenir parfois «une idéologie au-delà des faits» chez ses adversaires. Avec son approche dépassionnée et rigoureuse, il entend cependant montrer aux autres acteurs de la prévention que les adeptes d’une ligne conservatrice ont un rôle à jouer dans la lutte contre les drames humains.




Russophile sans crainte et sans reproche

Guy Mettan, vous avez récemment donné une conférence aux Ateliers de la Côte, à Etoy (VD), qui a fait jaser. On vous accuse notamment d’être devenu un «troll* du pouvoir russe». Cela vous fait quoi?

C’est une accusation qui est assez fréquente à mon sujet. C’est une manière de verser à la fois dans l’insulte et dans l’amalgame, en faisant appel à deux notions taboues, «troll» et «Poutine», qui sont censées faire fuir tous les gens respectables. Il y a deux faiblesses dans ce discours : d’une part, je n’ai jamais rencontré Poutine. Je l’ai croisé dans des événements, mais je ne prends pas non plus mon petit-déjeuner avec lui. D’autre part, quand j’écris sur la russophobie ou sur l’Europe, je ne fais pratiquement jamais référence à des auteurs russes. Je les lis pour savoir ce qu’ils pensent et ce qu’ils disent, mais je ne les cite pas pour ne pas pouvoir être accusé de «trollisme poutinien». Je prends toujours des sources de journalistes d’investigation généralement américains.

Malgré le contexte de la guerre en Ukraine, vous ne cachez pas votre russophilie…

Oui, mais comme je ne cache pas mon américanophilie, ma francophilie, ma germanophilie… J’aime tout le monde. J’ai simplement un rapport particulier avec ce pays depuis l’obtention de la double nationalité au moment de l’adoption de notre fille Oxana. C’est ce qui m’a conduit à le connaître d’une façon particulièrement étroite.

Ces derniers mois, y a-t-il eu un moment où vous avez été tenté de la mettre en sourdine sur ce sujet?

Non, parce que je suis un adepte du vrai journalisme, qui repose sur la transparence. Quand on cache ses liens d’intérêts, on trompe son lecteur. Or ce qui m’horripile, dans les médias installés, c’est que beaucoup de journalistes sont inféodés à l’atlantisme alors qu’ils ne le disent pas et ne le reconnaissent pas.

Peut-être parce qu’ils n’en ont pas conscience, tout bêtement?

Oui, mais c’est tout aussi grave. Si on prétend informer les gens, il faut savoir d’où on tire ses informations ou à quel système de valeurs on se réfère. Moi, j’aime la transparence et c’est pourquoi je n’ai jamais caché ma double nationalité ainsi que les raisons pour lesquelles je l’avais obtenue. Elle n’a d’ailleurs rien à voir avec Poutine puisque c’était Eltsine qui était président à l’époque et qui me l’a accordée.

Avec votre rapport à ce pays, vous avez le sentiment de faire figure d’exception dans les médias romands?

Il y a un ou deux journalistes comme moi mais c’est très rare. Dans l’opinion publique, cependant, les choses sont différentes puisqu’on sent une bonne partie de l’opinion ouverte aux idées critiques et qui ne se contente pas de la soupe de propagande qu’on lui sert habituellement. Comme dans le cas de la crise Covid, je dirais que cela représente un bon tiers de la population. Sur ce tiers, on peut encore descendre à 10 à 15% de personnes qui suivent vraiment l’actualité et qui trouvent les faits que j’expose crédibles. Elles sont en tout cas d’accord que l’unilatéralisme actuel n’est pas acceptable.

Vous faites référence au Covid, dont il est beaucoup question dans votre livre. Autant votre connaissance de la Russie est indiscutable, quoi qu’on pense de vos positions par ailleurs, autant vous vous aventurez là dans un domaine qui n’est pas le vôtre. N’est-ce pas risqué?

Je ne suis ni épidémiologiste ni médecin, en effet. Je suis un citoyen dont le métier consiste à poser des questions puis à juger de la qualité des réponses qu’on lui donne. Quand je constate qu’il y a des choses qui ne collent pas, je le fais savoir. Mais ce n’est pas non plus le cœur de mon livre. Ce que j’ai essayé de dénoncer, c’est la «tyrannie du Bien», qui est multiforme. Il y a la variante de droite qui impose une vision totalitairement économique, néo-libérale du monde, avec son vocabulaire du management. Et il y a la version de gauche, avec tout son verbiage wokiste et antiraciste, qui cherche à imposer le point de vue des minorités à la majorité…

Vous comparez néanmoins le «vaccinisme» à un totalitarisme…

J’étais content que l’on trouve des vaccins, mais je demande pourquoi l’on ne s’est jamais intéressé à ceux des Chinois, des Russes ou des Cubains, citoyens d’un tout petit pays qui en a produit cinq! Une autre chose que la presse aurait dû soulever, c’est que la gestion d’une épidémie est une question politique, et pas uniquement sanitaire, du moment que l’on entrave des libertés fondamentales, de mouvement, de culte, de commerce… Le minimum, dans un tel cadre, aurait été qu’il puisse y avoir un débat. Surtout que pour grave qu’elle ait été pour beaucoup de personnes, cette épidémie n’a pas non plus représenté le retour de la peste noire.

Est-ce que vous assumez le fait d’être devenu l’un des visages du «complotisme»?

C’est la manière actuelle de discréditer n’importe quelle voix critique, même quand elle pose des questions valables. C’est un procédé inacceptable, surtout de la part de personnes qui prétendent défendre la liberté d’expression. Mais c’est plus leur problème que le mien, moi je ne prétends pas avoir la science infuse, juste poser des questions. C’est d’ailleurs par le doute que progresse la science, pas par la certitude.

Votre carrière a été riche, tant du côté journalistique que politique. Est-ce que vous vous radicalisez sur la fin?

Tout ma vie, j’ai été un critique et je n’ai pas l’impression d’avoir beaucoup changé. En revanche, ce qui a beaucoup évolué depuis l’époque de mes études, c’est qu’à l’époque les regards critiques se trouvaient surtout à gauche et à l’extrême-gauche. Aujourd’hui, cette sensibilité a pratiquement disparu comme force d’opposition. Les voix critiques se sont plutôt déplacées vers des nouvelles formes de la droite. Un constat, néanmoins: les critiques de l’atlantisme, ou de l’impérialisme occidental, sont plutôt de droite en Europe et exclusivement de gauche en Amérique latine. Ce constat invite à ne pas fétichiser ces notions de gauche et de droite, qui sont sans doute des repères utiles, tout au plus.

*En langage internet, un «troll» est une personne qui prend de façon délibérée les positions les plus extrêmes pour semer la zizanie dans les discussions en ligne.




Après le refrain anti-police, l’indignation d’un élu PLR

«Tout le monde déteste la police!», en chœur et en rythme, comme l’affirmation joyeuse d’un credo indiscutable. Ainsi s’est terminé, le 6 juillet dernier, le concert d’un duo électro punk, «Crème Solaire», organisé devant la cathédrale de Lausanne. Un moment délire et sans doute très fun, qui avait cependant la particularité d’avoir lieu dans le cadre d’un festival subventionné, et encore en début de soirée. Habitant du quartier et habitué du festival, le président de la Ligue vaudoise et avocat Félicien Monnier se trouvait sur les lieux. Choqué par l’appel à la haine, il postait dans la foulée une vidéo de l’événement sur Twitter, avec une demande d’explication adressée à la Ville de Lausanne. Une demande restée sans réponse. Au cœur de son indignation, le fait que de tels propos aient été proférés dans un cadre subventionné, donc avec le soutien financier des employeurs des personnes invectivées.

Après les cris, le silence gêné

Depuis? Silence radio général, toujours. Enfin non, tout juste a-t-on appris, de la part de la Police municipale de Lausanne, qu’il n’était pas tout à fait juste d’affirmer que «tout le monde déteste» les agents. Un récent sondage auprès de la population suisse plaçait en effet la police en première position des institutions en lesquelles elle a confiance. Et sinon? Sinon l’attaque tombait un peu mal, tant la période était chargée pour des agents largement mobilisés par le Tour de France. Quant au festival, son programmateur Gilles Valet n’en faisait pas tout un plat non plus, surtout satisfait d’avoir vécu un «concert de feu».

« Si un artiste avait dit ʻOn déteste tous les employés de la Fondation pour l’Animation socioculturelle Lausannoiseʼ, quelque chose me dit qu’il y aurait eu une réaction. »

Xavier de Haller, député PLR au Grand conseil vaudois

Cette passivité générale fait fulminer le nouveau député PLR Xavier de Haller. En partance du Conseil communal, il ne se voit pas intervenir sur un sujet qui sera condamné à être traité en son absence. «Il n’y aura donc probablement pas de réaction politique, en tout cas pas du PLR (ndlr auquel appartient Pierre-Antoine Hildbrand, municipal à la tête de la sécurité), et je le regrette.» Ce qui ne l’empêche pas de dénoncer un problème moral évident : «A mon sens, si les artistes doivent bénéficier d’une certaine latitude, il n’en demeure pas moins qu’il y a un cadre que les autorités qui soutiennent financièrement ce genre de manifestations doivent faire respecter.» Autre problème soulevé par l’homme de loi, fréquent défenseur de policiers, les devoirs de l’employeur: «On met en cause, en chantant ce genre de paroles, le travail de collaborateurs et collaboratrices de la collectivité. Or c’est aussi le rôle de cette collectivité de protéger l’intégrité morale et psychique de ses employés. Si un artiste avait dit ʻOn déteste tous les employés de la Fondation pour l’Animation socioculturelle Lausannoiseʼ, quelque chose me dit qu’il y aurait eu une réaction. Alors je pose la question: est-ce que la Ville protège véritablement la personnalité de tous ses collaborateurs?»

Policiers dégoutés

Entrés en contact avec Le Peuple depuis les faits, plusieurs agents lausannois confirment l’existence d’un malaise. La mollesse des réactions illustrerait à leurs yeux la faiblesse de l’AFPL, l’association professionnelle des policiers, sorte de syndicat que d’aucuns comparent surtout à une simple «amicale» en lien étroit avec le commandant Botteron. «Le politique tient la police et la musèle», conclut un agent dégouté. Un autre, qui dénonce la frilosité et l’isolement du municipal en charge de la sécurité, seul homme de droite au sein de la Muni de la capitale olympique, demande la mise en place d’une charte avec le Festival de la Cité pour que de tels événements ne surviennent plus à l’avenir.




Un punk à Guantanamo

De fait, notre homme juge même qu’«être punk aujourd’hui, c’est être modéré.» Une affirmation sur Twitter, pas forcément inintéressante d’ailleurs, que la suite du message semble contredire. Car l’ancien de Reporters sans Frontières n’y va justement pas avec le dos de la cuillère : «Être punk, c’est rêver d’Europe, aimer la bannière bleue étoilée. Être punk, c’est préférer l’Otan à l’alliance des salles de tortures Moscou-Damas-Pékin.» Comprenez: il y a les bonnes et les mauvaises tortures. Par exemple, un punk modéré peut vraiment beaucoup se réjouir du waterboarding cher aux tortionnaires de Guantanamo. En revanche, quand ce sont les méchants – ceux de l’axe du mal – qui y vont de leurs petites fantaisies, le punk modéré n’est pas d’accord.

Et l’on se dit qu’être dans la tête de Robert Ménard ne doit pas être une torture très modérée.

L’Uber sera rude

Emmanuel Macron a favorisé en coulisse l’arrivée en France d’Uber, alors qu’il était encore ministre de l’économie. Diantre, un politicien qui manœuvre secrètement pour créer des emplois dans son pays!

Qu’on le destitue, vite. Voilà, on vous a résumé la fameuse affaire des «Uber Files», qui agite la France depuis quelques jours. Et on a peut-être tort de se limiter à une description si sommaire, tant il semble scandaleux à certains de découvrir aujourd’hui que le président français est un libéral. Nous, il faut bien l’avouer, «ça nous en touche une sans faire bouger l’autre», comme l’a élégamment déclaré Jupiter en hommage à une fameuse citation de Jacques Chirac. Parce que finalement, mieux vaut un malhonnête qui donne du travail à ses concitoyens qu’un très vertueux qui, par souci de justice sociale, dirige tout son peuple vers les allocations familiales.

Alain Berset n’a pas franchi le mur du çon

Alain Berset a été contraint d’atterrir par l’armée de l’air française

La voilà, l’aubaine pour se faire du gauchiste! Imaginez, un conseiller fédéral, le même qui limitait toutes nos libertés en temps de Covid, a été forcé d’atterrir par la police aérienne française alors qu’il faisait un tour en avion! Ah le voyou de socialiste qui se fait plaisir dans les airs tandis que l’on nous somme de veiller à la santé de la planète.

Eh bien non, soyons cohérents: Alain Berset a bien raison de faire de l’avion si cela lui plaît, tout comme les écologistes qui veulent se passer de viande ont bien raison de se l’interdire dans leurs réunions privées. Il sera difficile de réclamer davantage de liberté, à droite, pour ceux qui auront pris l’habitude d’employer les armes de l’adversaire dès que cela les arrange. Il en va d’une certaine hygiène intellectuelle.




La famille traditionnelle prend l’eau

Oui, vous avez bien lu: désagréable, et nous assumons ce mot. «Mais n’êtes-vous pas ce média qui ose enfin défendre des valeurs traditionnelles?», nous direz-vous sans doute. Oui, c’est le cas, à ceci près que nous ne pensons pas que l’on puisse fêter une telle décision de justice comme Nadal célèbre un point gagné à Roland-Garros. Lorsqu’il est question de vie ou de mort, ou de la souffrance de mères célibataires dans un ghetto, la réaction de ceux qui prétendent porter fièrement des valeurs civilisationnelles doit être digne, et à la hauteur des enjeux.

La famille, aujourd’hui, prend l’eau. Il faut être parent, peut-être, pour comprendre la dérive d’une société dont les petits écoliers croient désormais que les hommes peuvent «être enceints». Comment ne pas être effrayé, aussi, par la façon dont des concepts comme la masculinité «toxique» ou «la non-binarité» se sont imposés, alors qu’ils renvoient à des réalités qui n’existent que dans l’esprit d’universitaires militants. On peut comprendre, dès lors, le retour de balancier actuel, et les excès qu’il suscite. Reste qu’une décision de justice de la nature de celle qui ébranle les états-Unis doit être accueillie avec une certaine circonspection.

Y aura-t-il moins d’avortements après la décision de la Cour suprême américaine? Peut-être. Y aura-t-il moins de misère, de détresse et de promiscuité? Assurément pas. Car ce qui tue, ce qui nous tue en tant que société, n’est pas la dimension plus ou moins permissive de nos lois. Ce qui nous tue, c’est l’obligation qui nous est faite à tous de «prendre notre pied» en permanence. Ce qui nous tue, c’est cette idée que l’autre, le partenaire, n’est là que pour être consommé, et que l’on pourra jeter le fruit de notre union en cas de désagrément. Ce qui nous tue, c’est que l’idée de transmettre un héritage, des traditions, une foi, est désormais suspecte.

Les états-Unis ont pris une décision qui semble consacrer la victoire des chrétiens conservateurs. A ceux-ci de ne pas se laisser berner en pensant que la messe est dite, et les bébés sauvés. S’ils ne savent plus être le sel de la terre, et porter dignement un nouvel idéal pour ce monde, leur triomphe sera de courte durée.




La haine de la police s’invite au Festival de la Cité

Président de la Ligue vaudoise et avocat, Félicien Monnier est un réac assumé qui ne crache pas sur une bonne bière. Habitant du quartier de la Cité, à Lausanne, il s’est rendu mercredi au festival du même nom, qui fête cette année ces cinquante ans. Un festival qui, à ses yeux, fait partie des incontournables de la vie culturelle du Canton.

Au menu, du « glitch hop électro punk » avec les Fribourgeois de Crème Solaire. « Au début, c’était totalement déjanté et assez rigolo, témoigne l’avocat. La chanteuse avait une énergie folle ». Seul problème, le second degré ravageur du duo a basculé vers tout autre chose à la fin du concert, avec un refrain anti-flics qui a largement déplu à notre festivalier. De quoi le pousser à dénoncer la situation sur Twitter.

« Tout le monde déteste la police », vraiment?

En tout cas pas Félicien Monnier, qui s’étonne que de tels messages, scandés à la manière caractéristique des Gilets Jaunes, puissent avoir droit de citer dans un festival largement subventionné. « Certains me rétorquent qu’il s’agit de second degré, d’autres invoquent la liberté artistique. Mais qu’adviendrait-il si, par exemple, 250 personnes criaient leur haine des enseignants? » Pour lui, ce qui s’est exprimé devant la vénérable cathédrale de Lausanne n’est rien d’autre qu’un « marqueur de coolitude ». Soit quelque chose de « très superficiel », mais qui se déploie « sur la base d’un message haineux ». D’autant plus absurde, selon lui, que le reste du spectacle n’était pas du tout dans cette veine.

« Il y avait une ambiance de feu« 

Gilles Valet, programmateur

Présent sur les lieux, les programmateur Gilles Valet ne regrette en tout cas pas d’avoir fait venir le duo déjanté sur scène. Il se réjouit d’avoir vécu un concert incroyable avec « une ambiance de feu ». Les artistes, à ses yeux, « ont le droit d’avoir un côté militant » et ce n’est « pas le rôle du festival de leur mettre des barrières ». Reste que les organisateurs de l’événement, au ton très inclusif, ne feraient pas venir des artistes aux messages haineux envers d’autres groupes. « Crème Solaire » ont un côté punk décalé, rétorque Gilles Valet. C’est le rôle des artistes de choquer et d’interpeller. » L’organisation du festival précise néanmoins que la collaboration avec les services de la Ville sollicités est saine.

Une période difficile pour les agents

Contactée, la Police municipale de Lausanne ne souhaite pas faire de commentaire sur le concert. Elle confirme néanmoins que la période n’est pas simple pour elle: « En raison de la multiplicité des manifestations, en sus du Tour de France, la période s’avère chargée pour le Corps de police. » Autant dire que se faire houspiller dans un tel contexte ne doit pas être des plus agréables.
Et le service de presse de souligner, un brin chafouin, qu’un « récent sondage auprès de la population suisse place la police en première position des institutions dans lesquelles elle a confiance. »




Le grand malaise du mariage homo

Dans les milieux chrétiens, il est fréquent d’entendre que les églises doivent «cheminer» avec la société, «être en dialogue» avec elle pour mieux accompagner ses évolutions. Bref, dans la foi comme en politique, «le changement c’est maintenant», c’est-à-dire tout le temps, comme s’il s’agissait forcément d’un bien en soi.

Au sein de l’Église évangélique réformée du canton de Vaud (EERV), ce désir d’épouser les nouveaux contours de la société vient de se traduire par une décision qui heurte ses membres de sensibilité plus classique: marier, lors des cérémonies concernées, les couples homosexuels de la même manière que les couples hétérosexuels. Cette unification des rites, déjà en vigueur dans d’autres cantons, a été validée au milieu du mois dernier, lors du synode (l’assemblée légiférante) de l’institution, qui se tenait à Bavois.

Sur le papier, une décision parfaitement démocratique, obtenue au sein de l’organe compétent. Sauf que cette nouvelle couche d’«ouverture» s’ajoute à des mois de tension interne, entre passage du logo de l’église aux couleurs de l’arc-en-ciel ou débats organisés entre convaincus de la libéralisation, en amont de la votation sur le mariage pour tous, l’an dernier. Fuite en avant? Tel n’est pas l’avis du conseiller synodal Laurent Zumstein, grand artisan du projet. «Depuis le premier juillet (ndlr, entrée en vigueur du «mariage pour tous» en Suisse), notre règlement n’allait plus être adapté puisque des changements de vocabulaire devaient être opérés. Le synode a pu choisir entre deux options: le modifier en gardant deux cérémonies ou aller vers une unification. Mais de toute façon, il devait se positionner.» Et de préciser que les opposants, membres d’un courant appelé R3, ont été rencontrés en amont, avec pour résultat la naissance d’une «clause de conscience» pour les ministres refusant de marier des couples homos au même titre que les couples hétéros. «Leur choix ressemblait à celui d’un végétarien à qui on demande s’il souhaite du poulet ou du bœuf: de toute façon ils n’étaient pas d’accord dès le départ.»

Reste à voir la forme que prendra cette fameuse «clause de conscience», voire si ce seul terme sera gardé. Entre ceux qui l’estiment indispensable pour protéger spécifiquement les ministres contre une obligation de se soumettre aux inclinations «gay friendly» de leur église, et ceux qui l’estiment superflue, le combat ne fait que commencer en vue du prochain synode, qui se tiendra en novembre. La crainte sous-jacente des milieux conservateurs est qu’une défense du mariage traditionnel ne se transforme à terme en frein à l’embauche pour certains pasteurs. Une inquiétude que la surcommunication de l’EERV sur ses valeurs sociétales toujours plus libérales n’est pas de nature à apaiser.

Désir de vengeance

Dans un communiqué envoyé dans la foulée de la décision du synode, le courant «confessant» R3 affirmait d’ailleurs que l’Église n’est pas tenue d’adapter sa compréhension du mariage aux «évolutions morales enregistrées par la législation civile». Son auteur, Martin Hoegger, déplorait également des documents préparatoires «clairement orientés» et une commission d’examen peu représentative de la diversité des points de vue existants sur la question du mariage homo au sein de l’EERV. Et de citer la Bible, qui incite les chrétiens à ne pas se «conformer au monde présent».

«Nous ne voulons pas d’une Église qui suive le monde, nous voulons d’une Église qui entraîne le monde.»

Gilbert Keith Chesterton écrivain britannique, 1874-1936

Les liens étroits entre une église subventionnée et l’état sont-ils à l’origine de cet alignement sur les normes de la société civile? C’est ce qu’estiment certains paroissiens, qui jugent que l’EERV aurait pu résister, sans mettre son statut d’«institution d’utilité publique» – et donc sa subvention – en danger. «Mais on préfère se laisser pénétrer par l’esprit du temps», déplore un fidèle, qui ne cache même pas un certain «désir de vengeance». Un appétit de revanche heureusement tempéré par la compagnie d’autres chrétiens dans des groupes de maison, nés après l’introduction d’une bénédiction spécifique pour les couples gays en 2013. «Je ne me sens pas moins pécheur qu’un homosexuel», précise ce membre du R3, qui se dit surtout blessé par un certain manque de considération au sein de l’institution, laquelle aurait procédé à une «redéfinition du mariage» pour le moins hâtive. Une démission du synode, de la part d’un membre heurté par la manière dont les récents événements se sont déroulés, est également évoquée.

Un épuisement théologique

Également subventionnée, l’Église catholique n’est en tout cas pas près de vivre un épisode similaire. Des raisons administratives sont en cause: «Sa structure, dans le canton de Vaud et de manière générale en Suisse, est duale, avec des fédérations qui traitent directement avec les autorités politiques, et des autorités pastorales, notamment les évêques, qui ont un autre statut», explique Olivier Schöpfer, porte-parole dans le canton de Vaud. Sans entrer dans le fond du débat, cette situation rend, selon lui, l’Église catholique moins sujette à une quelconque course à l’alignement sur les décisions politiques. Ce qui n’empêche pas certains courants de regarder avec délectation les virages de leurs frères et sœurs réformés, à l’instar d’un agent pastoral qui, dans les colonnes de La Broye, vient de faire fort: il y salue une approche «plus pragmatique de la sexualité et sa complexité» et remercie ses amis réformés pour leur lecture «actualisée et ouverte» de l’écriture, préparant l’entrée dans un temps nouveau dont le catholicisme ferait bien de s’inspirer.

Crainte par les institutions, espérée par certains de leurs membres conservateurs, une future scission entre Églises et État se situe certainement en arrière-plan de toutes les tensions. Avec cette certitude que le jour où un parti de gauche demandera la fin des subventions, les institutions religieuses perdront à coup sûr. «Mais il n’y a pas de pression exercée par l’autorité politique», souligne un observateur, qui ne voit personne au Conseil d’état demander des femmes prêtres, par exemple. Aux yeux de cet universitaire, la situation actuelle relève surtout de «l’épuisement théologique». C’est elle qui conduit des institutions qui se vident à se targuer d’être chaque jour un peu plus en phase avec la modernité. Mais, toujours à ses yeux, c’est peut-être elle aussi qui incite les courants conservateurs à sauter sur la moindre occasion pour dénoncer des dérives fondamentales alors qu’elles ne portent pas sur le cœur de la foi.

Commentaire

Dans l’article rédigé par une consœur de Protestinfo, et publié par 24 heures au lendemain du synode, il était question d’un «toilettage» de règlement qui devait être effectué en matière de mariage homo. Le terme, qui n’engage certes pas l’Église évangélique réformée du canton de Vaud (EERV), est terrible. Serait ainsi sale, voire susceptible de subir le passage d’une brosse à WC, tout ce qui, en matière de religion, s’appuierait sur une vision classique de la famille. Mais comment s’en étonner alors que la sacro-sainte injonction à «suivre le mouvement» semble constituer le cœur de l’évangile, chez certains? L’écrivain britannique Chesterton avait exprimé son désir d’une église qui ne suivrait pas le monde, mais qui le secouerait. Que l’on soit favorable ou non aux innovations rituelles au sujet des couples homosexuels, force est de constater que nos institutions sont désormais largement alignées sur des fonctionnements démocratiques, qui donnent le ton même pour des besoins peu présents. L’on a peu entendu dire que les cantons où des mariages homos peuvent déjà être célébrés religieusement ont vécu un raz-de-marée de demandes en ce sens. Dès lors, face à ce qui apparaît avant tout comme un vaste exercice de communication, on peut douter qu’une application stricte des règles démocratiques soit réellement la bonne matrice pour des innovations majeures dans le domaine de la foi. Le jour – pas si lointain – où les «trouples» seront entrés dans les mœurs, nombreux seront peut-être ceux qui ne voudront pas juger leur amour. Une «lecture dynamique» de la Bible sera alors certainement possible pour accompagner rituellement un nouveau changement de société.




L’onde de choc venue des USA

Bien sûr, du côté catholique, l’Académie Pontificale pour la Vie, à Rome, s’est fendue d’un communiqué rappelant qu’«en choisissant la vie, c’est notre responsabilité pour l’avenir de l’humanité qui est en jeu.» Mais en Suisse romande? Pas grand-chose, à l’évidence, sauf du côté des réseaux sociaux sur lesquels certains milieux n’ont pas le triomphe modeste, ou l’indignation contenue. C’est que du côté des institutions, le malaise règne, avec une position pas toujours facile à assumer: «On ne peut pas être pour l’avortement, mais on ne peut pas non plus être contre», explique par exemple Laurent Zumstein, conseiller synodal au sein de l’Église évangélique réformée vaudoise. Qui développe: «On ne peut pas être pour la mort d’un fœtus, mais cela ne suffit pas de juste dire ça. Derrière, il y a des enjeux sociétaux et des enjeux de personnes et cela appelle à certaines nuances.» Une ligne qui était, peu ou prou, celle des auteurs d’un document de la fédération des églises protestantes suisses de mars 2012, qui soulignait que «l’avortement est une infraction à l’interdit de l’homicide» qui «n’entre en considération que comme solution d’ultime recours.» Rédigé dans le contexte d’une votation sur le financement privé de l’avortement, le texte s’opposait à cette proposition, susceptible de constituer un «premier pas» vers la privatisation tout court des avortements.




« Je ne cherche pas la polémique pour la polémique »

Jonas Follonier, vous venez d’annoncer votre entrée au comité de ch-media, association de journalistes plutôt marquée à droite. Vous avez l’âme syndicaliste maintenant?

Pas du tout. ch-media (ndlr à ne pas confondre avec l’éditeur du même nom) est issu d’une scission avec impressum, qui est l’organisation principale des journalistes de Suisse romande et qui se définit elle-même comme un syndicat. L’association ch-media n’a pas de revendications de gauche et ses membres ont l’âme indépendante.

Mais concrètement, que peut une telle association, plutôt vieillissante, face à la force du nombre des journalistes de gauche?

Fédérer les membres qui croient à un journalisme diversifié, curieux et sérieux. Mais aussi favoriser les bons conseils des anciens, et nous permettre le bonheur de nous retrouver entre confrères sans le vivre comme une communion entre «gens bien». Nous ne nous prenons pas au sérieux à titre individuel; nous ne prétendons pas non plus avoir inventé le journalisme, mais préférons les moments de réflexion et de légèreté. Notre association délivre cependant des cartes de presse au même titre qu’impressum, sur la base de critères similaires.

Vous jugez vraiment qu’il n’y a pas de diversité dans notre métier?

Si, il y en a. Il y a même beaucoup plus de journalistes originaux que l’on croit. On en trouve dans tous les titres. Mais ils se sentent plutôt seuls à l’interne. De façon générale, les rédactions sont absorbées dans des modes, du prêt-à-penser et des façons de travailler qui se transforment en une forme de conformisme. Certains professeurs d’université ou artistes me partagent du reste le même genre de constats, et une impression de solitude les concernant, qui me préoccupe.

Vous-même, on ne peut pas dire que vous soyez ostracisé: vous êtes partout, et même à la télévision sur Léman Bleu…

Mais je ne me plains pas du tout, c’est autre chose que je dis. Je ne parle pas de moi, mais de l’état global du journalisme dans notre coin de pays et de l’évolution de cette vocation. Dans les grands médias, il n’y a plus beaucoup de «personnalités», à l’inverse de ce que l’on connaissait naguère. Et ce n’est pas parce que des démarches isolées comme celles du Regard Libre, de Bon pour la tête ou du Peuple existent et vont grandissant que cela signifie pour autant qu’il y a un équilibre. Mais qui sait, ça peut changer!

Vous êtes certes ouvertement de droite, mais très prudent sur les thèmes de société qui fâchent. C’est du calcul, de votre part?

Je ne me considère pas comme prudent, donc non il n’y a pas de calcul. Être nuancé, en revanche, est une question d’hygiène intellectuelle. Le récent essai de Jean Birnbaum, Le Courage de la nuance, m’a beaucoup parlé. Si une chose est vraie mais pas sexy, il faut la dire telle qu’elle est. Je ne cherche pas la polémique pour la polémique, mais dire la vérité ou exprimer des opinions implique parfois de créer des débats vifs; cela fait partie de notre métier.

En quoi la droite progressiste que vous incarnez diffère-t-elle réellement de la pensée de gauche, omniprésente dans les médias?

Il ne faut pas prendre le terme de progressiste au sens où on l’entend habituellement. On veut tous que demain soit meilleur qu’aujourd’hui et que l’on évolue vers une société meilleure. Pour certains, conservateurs ou même réactionnaires, cela passe par la préservation, voire par un retour à certaines idées ou pratiques. Revenir à une certaine autorité à l’école, par exemple, me semblerait certainement être un progrès.

Le Regard Libre a une ligne assez intellectuelle. C’est le bon pari pour remettre des idées de droite sur le devant de la scène?

Non (rires). Ce n’est pas suffisant, évidemment, et s’il n’y avait que nous, nous ne toucherions pas tout le monde. Notez que nous ne sommes pas contre la presse classique, mais que nous existons de façon complémentaire à cette dernière. Du reste, notre objectif est moins d’apporter des idées de droite dans l’opinion que de proposer des débats pluralistes, rendus difficiles par le wokisme ambiant, miroir du puritanisme américain.

Comment vous situez-vous par rapport à l’héritage chrétien, cher à nos lecteurs?

Je ne suis pas étranger à l’héritage libéral, et je pense que ce n’est pas par hasard si celui-ci a pu se développer au sein de la partie du monde qui était chrétienne. Le christianisme a placé l’être humain au centre des préoccupations politiques et c’est une des influences évidentes du libéralisme, avec les traditions grecque et romaine. Les penseurs des Lumières avaient beau être contre les institutions religieuses, ils n’en étaient pas moins chrétiens de culture.




Guérilla cautionnée

Rebelles mais pas trop. Il y a une dizaine de jours, un groupe de militants écologistes a arraché du bitume pour le remplacer par des fleurs et des légumes dans le quartier des Pâquis à Genève. Largement médiatisée, la manœuvre questionne l’impunité dont jouissent les activistes climatiques.

L’affaire dévoile des passe-droits administrativo-politiciens invraisemblables. Nous avons ainsi pu lire dans 20 Minutes que la police aurait mis 2h30 pour agir et prendre les identités des activistes. Pourquoi un tel délai ? Contactée par Le Peuple, la maire de Genève, Marie Barbey-Chappuis, n’a jamais donné de réponse. Autre point qui vaut son pesant d’or, la Ville avait d’abord décidé de porter plainte contre les activistes. Jusqu’à ce que la RTS révèle que Frédérique Perler, conseillère administrative (membre de l’exécutif) écologiste genevoise, était au courant de l’action qui serait menée par les militants issus de deux groupes, Survap (association des habitants des Pâquis) et actif-trafiC (promotion de la mobilité douce). La magistrate aurait même donné des consignes afin que l’on détruise correctement le bitume à coup de marteau-piqueur et évite que des canalisations de gaz n’explosent. Une manœuvre qui pousse Philippe Nantermod, vice-président du PLR, à ironiser sur Twitter: «À Genève, les autorités politiques (vertes) prodiguent des conseils et fournissent des ingénieurs à ceux qui veulent casser la chaussée. Voilà des impôts bien dépensés.»

A la suite de ces révélations, Le Peuple a voulu obtenir certains éclairages auprès de Frédérique Perler, dont ceux-ci:
Quelles sont les bases légales qui vous ont permis d’accepter l’arrachage du bitume? A-t-on affaire ici à une forme de copinage entre actif-trafiC et vos services? N’est-ce pas un déni de démocratie que d’accorder des passe-droits à des citoyens? Auriez-vous accepté une action similaire, mais allant dans l’autre sens: un groupe de riverains estimant qu’il n’y a pas assez de places de stationnement et remplaçant de la verdure par du bitume? Le courriel est resté lettre morte.

Le Conseil administratif de Genève n’en est pas resté coi pour autant: fin juin, le collège a publié un communiqué indiquant qu’«au vu des éléments apportés par Frédérique Perler, il s’avère que des erreurs d’appréciation, dont la magistrate assume la responsabilité, ont pu laisser penser aux associations actif-trafiC et Survap qu’elles avaient obtenu l’assentiment de la Ville de Genève. Dès lors, la majorité du Conseil administratif a décidé de retirer la plainte.»

Et le CA de se montrer grand seigneur: «En tout état de cause, les contribuables de la Ville de Genève ne supporteront pas les coûts de la réparation des dégâts.» Ah bon? Mais qui alors? Frédérique Perler elle-même? Si tel est le cas, c’est bien l’argent des contribuables qui sera dépensé pour remettre la route en état, car même si elle devait payer une amende, la magistrate utilisera bel et bien l’argent des autres.