Vie pratique : comment déjouer les pièges inhérents à l’achat d’une culotte de bain ?
L’homme a de tout temps été taraudé par des questions existentielles. Comment le ciel et la terre ont-ils été créés ? L’univers est-il infini ou a-t-il des bords ? Y a-t-il une vie dans l’au-delà ? Est-il mal vu de réclamer un tube de Cenovis quand l’on dîne dans un restaurant triplement étoilé au Guide Michelin ? Pourquoi suis-je moi et pas quelqu’un d’autre ? L’operculophilie est-elle ou non une perversion ?
Conscient de l’impatience que l’énumération de ces sujets suscite parmi nos lecteurs, je dois cependant leur demander de ronger leur frein, car j’aspire aujourd’hui à leur fournir un guide pratique permettant de déjouer les pièges inhérents à l’achat d’une culotte de bain.
La distinction entre les culottes de bain non moulantes, les shorts larges et les caleçons de type « boxer » n’est pas chose aisée. La simple évocation de ces articles rappellera d’ailleurs des souvenirs douloureux à ceux de nos lecteurs qui, abusés par les conseils d’un commerçant peu scrupuleux, ont connu l’humiliation de sortir d’une crique méditerranéenne affublés d’un caleçon boxer détrempé et transparent sous les lazzis des autres baigneurs et le regard accusateur des forces de l’ordre.
Pour éviter ce genre de situation, quoi de mieux que de se fier à la compétence et à l’impartialité de l’Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières (OFDF) ? Son site Internet donne accès à un tableau synoptique énonçant un faisceau d’indices permettant à tout un chacun d’identifier à coup sûr une culotte de bain.

Unanimement considérée comme un défaut lorsqu’elle entache l’adjudication d’un marché public, l’opacité – nous l’avons laissé entendre plus haut – constitue en revanche la qualité majeure d’une culotte de bain. C’est donc à juste titre que le tableau synoptique de l’OFDF attire d’emblée notre attention sur le fait que l’étoffe d’une culotte de bain est opaque même à l’état mouillé.
Poussant plus loin son analyse, le document de l’OFDF relève qu’une culotte de bain non moulante est en règle générale équipée d’un slip intérieur présentant une structure en filet. Il précise qu’en l’absence d’un tel slip intérieur, ce sont la longueur et l’étroitesse des canons qui protègent des regards.
S’agissant des ouvertures, le tableau synoptique de l’OFDF est catégorique : les culottes de bain en sont démunies. Seule concession : elles peuvent à la rigueur présenter une imitation de fermeture réalisée par surpiqûre. La présence de poches constitue pour sa part un indice essentiel. À la différence des caleçons boxer, qui n’en ont aucune, les culottes de bain sont richement dotées de poches caractérisées par une bonne aptitude à l’évacuation de l’eau. Cette évacuation est assurée soit par des trous à œillets, soit par une étoffe intérieure en filet. Détail piquant, les culottes de bain sont par ailleurs munies de compartiments à monnaie ou à clé.

Le commerçant vous propose-t-il un article muni de passants de ceinture ? Méfiance et circonspection : en règle générale, les culottes de bain n’en comportent pas. Cependant, si des indices concordants vous donnent à penser qu’il s’agit tout de même d’une culotte de bain, une ceinture doit être enfilée dans ces passants. Quant à la présence de fentes latérales, elle doit également vous inciter à la prudence : si celles-ci sont très marquées, il y a fort à parier qu’un marchand indélicat cherche à vous refiler un vieux short d’athlétisme ayant appartenu à Michel Jazy et non une culotte de bain.
Les lignes qui précèdent ont été pensées comme un vade-mecum permettant aux messieurs de se frayer un chemin dans la jungle hostile des rayons sport de nos grandes surfaces. Mais que les dames ne se sentent pas discriminées ! La rédaction envisage en effet – toujours avec le concours aussi précieux qu’involontaire de l’Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières2 – de publier un article qui leur permettra de surnager dans les méandres de la bonneterie caoutchoutée et de faire à coup sûr la distinction entre les slips et les gaines-culottes.