Et Dieu… créa la personne possédant un utérus

Pour évoquer une pathologie spécifiquement féminine, Blick a désigné la plus belle moitié de l’humanité d’une façon surprenante. Mais qui fait son chemin.
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« What Is a Woman ? », soit « qu’est-ce qu’une femme ? ». Voici la question toute bête que
le journaliste conservateur américain Matt Walsh a posée à un panel d’intervenants variés,
l’an dernier, pour les besoins d’un film dénonçant les dangers de l’idéologie du genre.
L’idée : montrer que les discours militants, plus ou moins enrobés de vernis scientifique,
rendent peu à peu impossible tout sens commun, et peut-être même tout langage.
À la fameuse interrogation de Matt Walsh, une journaliste de Blick a proposé une définition
que l’on dira stimulante, à la fin du mois de mars. Se penchant sur le cas de l’endométriose,
un trouble touchant 179 millions de femmes dans le monde, selon le périodique
Reproduction & Fertility, notre consœur a évoqué « une des pathologies les plus fréquentes
chez les personnes avec un utérus ». Laissée en ligne l’espace de quelques heures, cette
formulation a été discrètement modifiée le matin suivant : « Alba J. souffre d’endométriose
– une des pathologies abdominales les plus fréquentes de l’utérus (…) ».
« Merveilleusement wokiste », ironise Clémentine Merminod, secrétaire des femmes UDC
romandes, elle-même transgenre et maman d’une fille souffrant de ce problème de santé. Et de proposer le calcul suivant : « Il y a environ 26 000
personnes transgenres en Suisse, dont potentiellement 13 000 homme transgenres…
Combien parmi ces derniers ont fait une ablation de l’utérus ? On parle probablement de
moins de 1000 personnes… sur 4,5 millions de femmes en Suisse… ».

O tempora, o mores !

Reste que ce n’est pas la première fois qu’une formulation similaire fait irruption dans
l’espace public. En 2020, le Planning familial des Bouches-du-Rhône avait suscité une vive
polémique en l’employant sur son compte Facebook. Les réactions avaient été très vives, à
l’image de celle de l’ancien président de la Licra Alain Jakubowicz, qui avait écrit :
« Comment s’appelle une personne qui a un utérus et qui a ses règles ? Si vous répondez une
femme, soit vous n’avez rien compris, soit vous êtes un horrible sexiste. En plus vous risquez
de tomber enceint.e ». Trois ans plus tard, et alors que le Planning familial diffuse désormais
des visuels affirmant que « des hommes peuvent être enceints », l’émotion de l’époque
semble presque touchante de naïveté.

Mais comment faire pour évoquer les problèmes de santé typiquement liés à un sexe sans
exclure les personnes trans ? Ne serait-ce pas, selon ce principe, une noble conquête de
l’humanité de ne plus associer les problèmes de prostate à la masculinité ? Nous avons
abordé plusieurs partis politiques et plusieurs sections femmes pour leur poser cette
question. Il faut savoir gré aux socialistes de nous avoir gentiment répondu par
l’intermédiaire de Julia Baumgartner : « Ce qui est problématique est que ces pathologies ne
sont pas considérées, explique-t-elle. Nous avons eu lors de notre assemblée d’octobre une
discussion sur la question lors d’une résolution sur le droit à l’avortement. Dans notre
document initial figurait “les femmes ou personnes ayant un utérus”. Cette formulation a
été amendée par une très forte majorité de nos membres par “personnes pouvant être enceintes” ». Et d’expliciter le sens de telles précautions de langage dans une réponse qui
peut être pudiquement qualifiée d’exigeante : « Ceci s’inscrit dans la logique de notre
combat intersectionnel (et ainsi des réponses que nous voulons y donner) que nous menons,
même s’il est évident que la non-prise en compte de certaines problématiques liées à la
santé ou des attaques contre l’autodétermination sont dues au fait que cela touche
essentiellement des femmes. »

Ainsi donc la figure de la femme post-moderne : une chose sans contours définis, parfois
réduite à la possession d’un organe, mais dont on sait qu’elle trouve sa plénitude dans un
statut de victime éternelle de l’autre moitié du genre humain.

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