Chouchoutage des soldats non-binaires : l’UDC va taper du poing sur la table

Cet article est proposé en partenariat avec Pro Suisse.

« Notre Armée manque de moyens. Elle en a assez, toutefois, pour financer un sondage sur la « non-binarité dans l’Armée suisse » ». C’est sur ce ton, un brin agacé, que débute l’interpellation concoctée par le conseiller national UDC Jean-Luc Addor après une drôle d’audace de l’Armée suisse. Alors que l’existence d’un genre dit « non-binaire » n’est pas reconnue par le droit suisse (n’en déplaise au chanteur Nemo), l’institution a lancé la semaine dernière un questionnaire visant à connaître le degré de bien-être des membres de cette communauté sous les drapeaux.

« Cela va nous permettre de mieux comprendre votre réalité et vos besoins », précise la page officielle du site de la Confédération. Les résultats, nous dit-on, « constituent une sorte de baromètre de l’interaction avec les militaires non binaires. » D’une durée de cinq à dix minutes, le sondage nous demande « quels sont les plus grands défis dans l’Armée suisse pour une personne non-binaire ? », si nous avons déjà vécu des discriminations dans ce contexte et, le cas échéant, si nous les avons dénoncées. 

Mais pourquoi écrire « nous », au fait ? Simplement parce que le sondage est ouvert à tous, une simple « information sur le sexe administratif selon la carte d’identité » étant requise à sa fin. Autant dire que pour la scientificité des résultats obtenus, des doutes sont permis. En revanche, niveau progressisme, toutes les garanties sont là.

Supprimer la diversité

C’en est de toute façon trop pour Jean-Luc Addor. Pour lui, il convient maintenant d’en savoir plus sur le budget du Service Femmes dans l’Armée et diversité (FdAD), à l’origine de cette enquête, ainsi qu’à propos du coût de l’enquête elle-même.

Proposant rien de moins que la suppression du volet « diversité » du FdAD, il livre le fond de sa pensée : « Au moment où Conseil fédéral et Parlement se retrouvent face au défi de moderniser notre Armée à temps pour faire face à des risques grandissants pour la sécurité du Pays, le moment n’est-il pas venu de revoir l’affectation de certains des moyens au demeurant insuffisants qui lui sont alloués ? »

En 2019, l’armée avait déjà fait sensation en ouvrant un bureau centré sur l’intégration des personnes transgenres. Des mesures avaient été annoncées pour « s’affranchir des règlements actuels qui discriminent les personnes transidentitaires », rapportaient Le Matin Dimanche et la SonntagsZeitung. On parlait alors de 18 personnes concernées au sein de l’armée. La ministre de la Défense Viola Amherd avait également présenté des objectifs de réduction des émissions de CO2 de son département. 

Commentaire : Soldat Bozo au rapport !

« Se soucier de ses soldats, leur montrer qu’on se préoccupe de leur bien-être et de leur moral, c’est central. Donc l’armée a en effet tout intérêt à s’y intéresser. Alors quel est le problème ? » Ainsi s’exprime un militant socialiste vaudois, Nicolas Schnorhk, sur X (ex-Twitter). Et à vrai dire, la question mérite d’être posée. Mais peut-être pas en temps de crise géopolitique majeure. 

Tandis que la guerre sévit en Europe et que la menace de terrorisme reste élevée, doit-on vraiment consacrer de l’argent public à une cause si marginale que le bien-être d’une minorité inexistante aux yeux de la loi au sein de l’armée ? Pourquoi pas, pendant qu’on y est, former les recrues au respect des accords toltèques et à l’ouverture des chakras, si le bien-être des soldats est « central » ?

Nous aurons peut-être, un jour, l’armée la plus morale du monde. Le seul problème est qu’elle servira à faire rire des enfants russes ou chinois dans des chapiteaux de cirque. 

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Le TF a tranché : pas de procession pour la Fraternité Saint-Pie X

Pas de baptêmes dans le lac pour les uns, pas de procession de la Fête-Dieu pour les autres : Les expressions de la foi et les théologies diffèrent fortement, mais le verdict est le même. Faute de soumission totale à l’État, concrétisée par la signature d’une déclaration d’engagement aux accents progressistes, de modestes expressions de la foi dans l’espace public sont définitivement interdites à Genève. « Christian pride », la procession n’avait pourtant jamais suscité de difficulté depuis 1993… Jusqu’à ce que la nouvelle loi genevoise sur la laïcité produise ses effets

« La religion est désormais a priori suspecte », s’indigne l’Abbé Jean de Loÿe, de l’oratoire Saint-Joseph de la Fraternité Saint-Pie X (FSSPX). Peu coutumier du fait, le jeune prêtre n’y va pas avec le dos de la cuillère pour dénoncer la décision du TF dans un courrier envoyé aux médias. Dans son message, il dénonce une déclaration d’engagement qui empêcherait, de facto, l’Église catholique de faire état de ses positions au sujet des « actes homosexuels » ou de l’avortement. L’affirmation de la « primauté de l’ordre juridique suisse », sans précision ni nuance, est également attaquée dans son texte, une juste désobéissance civile motivée par la foi ayant parfois constitué un rempart précieux à la barbarie. Un argument pas très éloigné de ceux du pasteur Jean-René Moret dans nos colonnes encore récemment.

La FFSPX fera-t-elle recours auprès de la cour européenne des droits de l’homme ? Non, car en Suisse c’est au TF d’avoir le dernier mot au niveau juridique, à ses yeux, et pas une instance plus lointaine. Quant à la prochaine procession, elle se fera sur le parking de l’oratoire, comme depuis 2022. « Nous revendiquons une certaine filiation avec les catholiques genevois qui ont souffert durant le Kulturkampf au 19ème siècle, avec d’ailleurs une continuité des positions. »

Qui aurait cru que le triomphe du progrès s’accompagnerait de la destruction des libertés religieuses minimales…

Sur le même thème:
Visite à « Tradiland » : https://lepeuple.ch/visite-a-tradiland-reportage/
Le pèlerinage de Chartres fait un petit en Suisse : https://lepeuple.ch/le-pelerinage-de-chartres-fait-un-petit-en-suisse/




Et si on respectait Israël ? (blog)

Ce texte est tiré du blog personnel de Nadine Richon

Tout le monde veut un État palestinien, mais sans préciser lequel. Même les gouvernements qui reconnaissent ce pays avant qu’il ne soit advenu ne précisent pas de quel État il s’agit : démocratique, théocratique, kleptocratique, pro-Hamas, pro-Hezbollah, pro-Iran, pro-Poutine, du fleuve à la mer, de Gaza à la Cisjordanie (et comment), avec quelle capitale, quels citoyens, quels dirigeants ?

L’invitation du patron de l’UNRWA, Philippe Lazzarini, par le parti socialiste vaudois, pour animer le 1er août lausannois, ne fait que rajouter du flou à ce paysage obscur au lieu de répondre à des questions simples : l’agence a-t-elle préservé sa neutralité humanitaire ou s’est-elle laissé piéger par des terroristes surarmés dans le contexte explosif d’une région dirigée par le Hamas ? Comment peut-on affirmer, en outre, que le choix de cet invité, qui a certes œuvré autant que possible pour soutenir les plus faibles vivant sous le joug du Hamas, n’a choqué que « la droite et les sionistes » ?

Il faut rappeler que les premiers protestataires étaient issus du Réseau laïque romand et d’un groupe de Suisses chrétiens et juifs, pas forcément tous « sionistes » ni tous « de droite ». Ces personnes ont reçu en effet le soutien du PLR. L’Association Suisse-Israël a protesté de son côté, ainsi que divers membres de la Communauté Israélite de Lausanne : nos compatriotes juifs ne sont pas tous de droite, ni tous pro-Netanyahou et il est important de le clarifier étant donné le flou ambiant. Le sionisme pourrait également être expliqué dans nos écoles vaudoises.

La Palestine verra le jour quand les Palestiniens auront donné à Israël des assurances claires au sujet de sa sécurité. Bien sûr, Gaza sous les bombardements israéliens et sous la domination du Hamas, la Cisjordanie déchirée et les haines décuplées par la séquence horrible déclenchée depuis le 7 octobre 2023 ne favorisent pas, du côté palestinien, la sérénité propre à envisager un État indépendant prêt à gouverner et à respecter son voisin israélien.

Sur le même sujet, les réponses aux critiques du syndic de Lausanne : https://lepeuple.ch/un-1er-aout-de-la-division-a-lausanne/

Dès lors, il incomberait d’abord aux pays démocratiques, dont la Suisse, de favoriser la clarté et la sérénité en exigeant à la fois la fin des bombardements et le respect d’Israël, violemment attaqué dans sa sécurité, comme aucun État donneur de leçons ne l’est depuis sa création même. Respecter Israël ce n’est pas l’accuser de « génocide » et autres folles affirmations portées jusqu’en Suisse, c’est traiter ce pays en ami, car seuls les amis auront la légitimité pour favoriser un jour la création d’un État palestinien.

Respecter Israël ce n’est pas reconnaître un État palestinien sans aucune précaution, c’est aider ce pays à rechercher le dialogue avec une Autorité palestinienne qui doit encore se montrer capable de gouverner de manière démocratique et pacifique. Respecter Israël, comme État juif, c’est rassurer les juifs du monde entier subissant un regain d’antisémitisme qui devrait nous pousser, toutes et tous, y compris un 1er août lausannois, à la prudence en nous abstenant de distribuer des leçons. Ceci, précisément, si nous voulons rester crédibles dans le processus qui mènera, après cette guerre, à une résolution – enfin – de ce long conflit arabo-israélien. N’est-ce pas cela la diplomatie ? N’est-ce pas cela œuvrer de manière humanitaire dans l’intérêt de toutes les populations ?

Nadine Richon / Réseau laïque romand




Le facteur sonne toujours deux fois

En lisant l’entretien de Christian Levrat dans le 24 Heures du 21 juin, j’ai eu une pensée émue pour Cyril, le facteur de mon enfance. Chaque jour, du lundi au samedi, il faisait le tour d’une kyrielle de villages et hameaux. Revêtu de l’uniforme et de la casquette règlementaires, il connaissait tout son petit monde, des nouveau-nés au vieillard à la barbe fleurie. Il prenait des nouvelles de chacun, partageait les soucis du quotidien, livrait des médicaments, amenait l’argent de l’AVS aux retraités et aidait à remplir des formulaires administratifs, tout cela en livrant courrier et paquets. Il n’hésitait pas à prendre un café et ne refusait jamais un petit coup de gnôle. Aujourd’hui, selon Monsieur Levrat, « La Poste s’adapte à l’évolution des besoins ».

Une question de lien social

Le libéralisme du camarade et ancien syndicaliste Levrat, confirme la triste constatation de Karl Marx et d’Engels dans le Manifeste du parti communiste : « La bourgeoisie a joué dans l’histoire un rôle éminemment révolutionnaire.
Partout où elle a conquis le pouvoir, elle a foulé aux pieds les relations féodales, patriarcales et idylliques. Tous les liens complexes et variés qui unissent l’homme féodal à ses « supérieurs naturels », elle les a brisés sans pitié pour ne laisser subsister d’autre lien, entre l’homme et l’homme, que le froid intérêt, les dures exigences du « paiement au comptant ». Elle a noyé les frissons sacrés de l’extase religieuse, de l’enthousiasme chevaleresque, de la sentimentalité petite-bourgeoise dans les eaux glacées du calcul égoïste. Elle a fait de la dignité personnelle une simple valeur d’échange ; elle a substitué aux nombreuses libertés, si chèrement conquises, l’unique et impitoyable liberté du commerce. En un mot, à la place de l’exploitation que masquaient les illusions religieuses et politiques, elle a mis une exploitation ouverte, éhontée, directe, brutale. »

Et oui, il reste des choses à en tirer.

Dans son ouvrage Gemeinschaft und Gesellschaft (1887), le sociologue social-démocrate allemand Ferdinand Tönnies (1855-1936) explore les dynamiques du lien social et pose les bases d’une distinction fondamentale entre deux types de relations humaines : la communauté (Gemeinschaft) et la société (Gesellschaft). Tönnies met en lumière les transformations sociales et les tensions entre tradition et modernité, offrant une analyse profonde de la structure sociale et des interactions humaines.

De la communauté…

La communauté, selon Tönnies, se définit par des relations personnelles et durables. Elle est souvent associée aux structures sociales traditionnelles comme la famille, les villages ou les groupes ethniques. Dans la communauté, les interactions sont basées sur des liens affectifs et une solidarité naturelle : « La communauté est un groupe basé sur des sentiments d’appartenance et de coopération, où les individus se voient comme une fin en soi plutôt que comme un moyen ». Les exemples typiques de Gemeinschaft incluent la famille et les communautés rurales. Dans ces contextes, les relations sont caractérisées par une forte cohésion sociale et des valeurs partagées. Par exemple, la famille est un espace où les individus interagissent de manière altruiste et solidaire, avec des rôles clairement définis et des obligations réciproques.

La communauté joue un rôle crucial dans la socialisation et la transmission des normes et valeurs. Elle offre un cadre de sécurité et d’identité aux individus. 

… à la société

À l’opposé de la communauté, la société se caractérise par des relations impersonnelles, contractuelles et souvent temporaires. Les interactions sont basées sur des intérêts individuels et économiques : « La société est une agrégation d’individus indépendants où les relations sont fonctionnelles et utilitaires, basées sur des contrats et des échanges ». La société favorise l’innovation, la mobilité sociale et l’efficience économique. Cependant, elle peut aussi engendrer l’aliénation, l’individualisme exacerbé et la fragmentation sociale. Les relations impersonnelles peuvent conduire à un sentiment de solitude et à une perte de sens collectif. Tönnies avertit : « La société, en privilégiant les relations contractuelles et utilitaires, risque de déshumaniser les interactions sociales et d’éroder le tissu social »

Une saine tension

Les tensions entre communauté et société sont inévitables. La société actuelle doit trouver des moyens d’intégrer les valeurs communes pour maintenir le lien social. Les politiques publiques et les initiatives communautaires jouent un rôle crucial dans cette médiation pour le bien commun. Une chose est certaine, ce n’est pas en fermant des offices postaux que l’on y parviendra. Sinon, avec Céline, j’affirme que tout finira par la canaille.

A bon entendeur, salut !




Un 1er août de la division à Lausanne

Cet article est publié en partenariat avec l’organisation Pro Suisse.

« Célébrer l’engagement et la tradition humanitaire de la Suisse ». C’est avec cette volonté que la Ville de Lausanne a annoncé ce mercredi la personnalité de son invité d’honneur pour les festivités du 1er août : Philippe Lazzarini, Commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). « Personnalité́ suisse incontournable sur la scène diplomatique internationale », il est décrit comme incarnant « parfaitement l’engagement pour la paix et la tradition humanitaire de notre pays, partie intégrante de notre histoire et de notre cohésion nationale. » 

« De l’huile sur le feu »

À peine annoncé, ce choix a fait tousser. Sur les réseaux sociaux d’abord, avec près de 8000 vues sur X (ex-Twitter) et des commentaires virulents : « Aviez-vous vraiment besoin de jeter de l’huile sur le feu et d’attiser les divisions entre Lausannois un jour de fête nationale ? », tonnait un internaute le jour-même. Et un autre d’enchaîner : « Mes pensées vont à la communauté Juive de Lausanne qui appréciera votre initiative à sa juste valeur. » Il faut dire que depuis plusieurs mois, la neutralité de l’UNRWA dans le conflit au Proche-Orient fait débat. À tel point que le renouvellement du soutien de la Suisse à l’agence onusienne a suscité d’âpres débats au niveau fédéral, pour finalement déboucher sur une solution de compromis à dix millions. 

Cette semaine, cette défiance vis-à-vis de la posture de l’UNRWA a suscité un élan pétitionnaire. Diffusée par des milieux pro-Israël, chrétiens ou en encore laïcs, une lettre demande à la Ville de revenir sur un choix « désastreux », la neutralité suisse étant carrément « bafouée » un jour de la fête nationale. Parmi ses relais politiques, Patrizia Mori, de l’UDC Lausanne : conseillère communale « qui tient à sa ville et à la neutralité », elle dit s’être sentie « révoltée » à la lecture du communiqué de la Ville. « J’ai trouvé ça complètement incompréhensible. Il y a un lieu et un temps pour tout… »

Aurait-on assisté à une « faute morale » de Lausanne ? Le député Vert’libéral David Vogel n’ira pas jusque-là. Ces derniers mois, cet élu est souvent monté au front contre les occupations d’université ou la hausse des actes antisémites, mais il tempère « Les pratiques de l’UNRWA ont été et sont critiquées par certains et sont louées par d’autres. Libre à la Municipalité d’inviter qui elle veut et d’être de ceux qui la supporte, c’est son droit. »

Pas la bonne année

Le problème, à ses yeux, est de faire un tel choix cette année en particulier : « Dans un tel contexte très « chaud » sur la question israélo-palestinienne, vu les évènements à l’UNIL et à l’EPFL, vu les dérapages antisémites en hausse, c’est importer en terre vaudoise un conflit et créer des tensions dont on aurait largement pu se passer. Résultat ? Des partisans chauffés à blanc des deux bords vont venir avec des drapeaux israéliens et palestiniens pour soutenir leurs idées et on va oublier de parler de ce qui nous réunit. Le 1er août est et doit être une fête qui rassemble, qui unit. Là, la Municipalité fait le choix politique de diviser et de créer des tensions. C’est d’une rare sottise que de ne pas prendre cet élément en compte dans son choix des invitations. » 

Et de préciser qu’il aurait réagi de la même manière si Lausanne avait invité l’ambassadrice israélienne ou un représentant de l’Autorité palestinienne.

Le syndic de Lausanne maintient de la choix de la Ville: « Un message de paix et de dialogue ». (Photo: Ville de Lausanne)

Le syndic de Lausanne, Grégoire Junod, réagit aux critiques

– Ces réactions surprennent-elles la Ville ?

Nous vivons une époque où l’actualité internationale, souvent tragique, nous préoccupe et occupe une place importante dans le débat politique en Suisse. C’est donc normal qu’il y ait des réactions. Philippe Lazzarini est suisse et a suivi une partie de ses études à Lausanne.

Engagé depuis trente ans dans l’aide humanitaire dans des zones de conflit, il est aujourd’hui commissaire général de l’UNRWA, poste auquel il a été nommé par le secrétaire général des Nations Unies. Il fait donc partie des citoyens suisses qui occupent parmi les plus hautes fonctions au niveau international. C’est dire s’il est légitime à être notre invité d’honneur à l’occasion de la fête nationale. Son engagement symbolise parfaitement la tradition humanitaire de la Suisse, constitutive de ce qu’est la Suisse. C’est un message fort de paix, de solidarité à l’égard de toutes les victimes civiles sur un terrain de conflit armé qui pourra être entendu le 1er août prochain.

Enfin, il convient de rappeler que la Suisse, comme de très nombreux États, a rétabli son soutien à l’UNRWA, après que l’organisation a été lavée de tout soupçon de complicité dans les atroces massacres commis par le Hamas le 7 octobre dernier.

– Depuis combien de temps cet invité était-il prévu ?

Les premiers contacts ont été pris il y a quelques semaines.

– Sur le fond, une telle invitation est-elle prudente dans la foulée des tensions qui ont notamment marqué les esprits à l’UNIL sur fond de conflit au Proche-Orient ?

Ne mélangeons pas tout. Philippe Lazzarini est un haut fonctionnaire de l’ONU, une des personnalités suisses les plus en vue sur la scène internationale et un acteur majeur de la solidarité avec les victimes civiles dans un conflit armé. C’est une figure dont l’engagement fait honneur à la Suisse et à sa tradition humanitaire. La Suisse a d’ailleurs été un acteur important de la paix au Proche-Orient avec son soutien à l’initiative de Genève en 2003.

 La fête nationale est un moment de rassemblement et de communion. C’est un message de paix et de dialogue qui sera porté le 1er août prochain, dans la tradition de notre pays.




Pour apaiser l’université, faut-il mieux encadrer ses Semaines d’Actions contre le Racisme ?

« Les femmes et le Coran », « Expériences, résistances et mobilisations des femmes musulmanes »« Boîte à outils antiracistes » destinée aux « étudiant·exs racisé·exs de l’UNIL et de l’EPFL »… 

Avec une ribambelle de propositions de ce genre, la Semaine d’Action contre le Racisme de l’Université de Lausanne avait suscité quelques interrogations, fin mars. En cause : l’oubli de la question de l’antisémitisme, une idéologie fortement « décoloniale » et la participation du très antisioniste Kehinde Andrews, titulaire de la chaire d’études noires à la Birmingham City University. Un intellectuel, rappelait Watson, qui invitait à ne pas confondre « terreur » et « révolution » à propos de la lutte armée du Hamas.

Présentation de l’événement sur le site de l’Unil.

De nombreux articles ont été écrits à propos des événements qui ont suivi sur le campus : occupation militante, chants controversés, fichage de professeurs collaborant avec des universités israéliennes… Aujourd’hui, le calme semble rétabli mais selon certains récits qui nous parviennent régulièrement, toutes les plaies ne sont pas encore guéries entre collègues. Alors que faire pour éviter que l’histoire ne se répète ? Et quelles leçons tirer de cet épisode ? Les réponses d’Amina Benkais-Benbrahim, Déléguée à l’intégration et Cheffe du Bureau cantonal vaudois pour l’intégration des étrangers et la prévention du racisme (BCI).

– Pensez-vous que la Semaine d’actions contre le racisme de l’Unil aurait mieux dû intégrer la question de l’antisémitisme ?

Le BCI ne fixe pas le programme de la Semaine contre le racisme, ne définit pas de thématique spécifique à chaque édition. Concrètement, il coorganise des événements, soutient les actions proposées par les acteurs de terrain (souvent des initiatives associatives ou communales), les coordonne, participe à leur financement et les relaie, notamment en publiant des informations sur la Semaine sur son site. Dans le cadre de l’édition 2024 de la Semaine d’Action contre le Racisme (SACR), 18 actions ont été soutenues par le BCI. Chaque porteur de projet -l’UNIL en est un parmi d’autres- est libre de son programme.

Cette approche ne se limite pas à la Semaine contre le racisme, le BCI est également en soutien de diverses actions en faveur de l’intégration et le vivre ensemble tout au long de l’année.

L’antisémitisme, à l’instar de toutes formes de racisme, doit être combattu et pas seulement pendant la Semaine contre le racisme ou à l’occasion de crises au Proche-Orient.  Le BCI est attentif à cet aspect du racisme. Ainsi en mai dernier, dans le cadre d’une séance réunissant 150 partenaires du BCI, une conférence sur la lutte contre le racisme et l’antisémitisme a explicité les différentes notions et définitions 

Image tirée d’une vidéo partagée sur les réseaux sociaux par le président du PS Vaudois, Romain Pilloud, au pic de l’occupation.


– Pensez-vous qu’il peut y avoir un lien entre cette semaine qui avait alerté pas mal de personnes engagées contre l’antisémitisme et les événements subséquents évoqués ci-dessus ?

Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question. En revanche, nous savons à quel point le conflit israélo-palestinien est extrêmement sensible. Ce qui me parait essentiel c’est de rester attentif à toutes les manifestations de racismes quel qu’elles soient, de continuer à sensibiliser le public et à accompagner les personnes confrontées à ces manifestations. 

– Allez-vous suggérer de resserrer la vis au niveau du programme de cette semaine l’année prochaine ?

Le BCI ne fixe pas le programme de la Semaine contre le racisme. Il soutient, notamment financièrement, les initiatives et actions proposées par les acteurs de terrain (en particulier communes et associations). 

Aussi, nous encourageons vivement les organisations et associations qui luttent contre l’antisémitisme à déposer des projets dans la perspective de la Semaine contre le racisme.

Le regard de Nadine Richon, blogueuse au Peuple et membre fondateur du Réseau laïque romand

Antisémitisme et actions contre le racisme

Je pense (…) que cette semaine contre le racisme a complètement raté la cible de l’antisémitisme, alors même qu’on était déjà face à une recrudescence du phénomène, en partie liée à la guerre de Gaza. Je ne sais pas si une information sur l’antisémitisme, à ce moment-là, aurait pu atténuer l’actuel recours décomplexé à une critique d’Israël fondée sur sa caractéristique de petit État juif dans l’océan du Proche-Orient, mais on peut penser que oui.

Il me semble que le politique doit inviter les enseignants actuels et en formation à éclairer la jeunesse de notre pays sur le lien entre l’antisémitisme et le slogan « de la rivière à la mer », emprunté à l’OLP des années 1960, et banalisé aujourd’hui par les occupants de nos universités. Si bien qu’on a vu un dirigeant du Hamas comme Khaled Mechaal féliciter les « étudiants américains et européens » pour leur reprise du fameux slogan, en y ajoutant lui-même « et du nord au sud » pour faire la jonction avec le Hezbollah.

Il faut rappeler une chose, cependant : ces étudiants représentent une minorité bruyante et faussement pacifiste, mais très marginale en Suisse. En outre, il faudrait se demander pourquoi la lutte contre l’islamophobie a pris une telle ampleur de nos jours, alors même que l’hostilité envers les musulmans de Suisse n’est pas plus flagrante qu’envers les juifs. Cela dit, aucune société n’est totalement immunisée contre le racisme et il y aura toujours du boulot dans ce domaine.

Il convient cependant de ne pas confondre racisme et critique d’une religion. Si l’expression publique de l’islam est absolue en Iran, par exemple, aucune religion ne peut se prévaloir de tous les droits dans une société démocratique. Une telle revendication risque d’accentuer le racisme envers des personnes tout à fait paisibles, et même pas forcément religieuses, mais identifiées comme appartenant à cette religion qui serait jugée pour le coup un peu trop remuante.




Il y a des indexations en enfer #blog

Mon premier souvenir de Lausanne doit dater de 1991. C’était la fin de l’année, les décorations de Noël réchauffaient admirablement le climat et une tante m’avait emmené voir La Belle et la Bête, sauce Walt Disney, au cinéma. À moi qui venais d’un petit village comme Vallorbe, la ville me semblait majestueuse et féérique.

Plus tard, dans ma vie, j’ai vécu à Lausanne. J’aimais mon quartier, très multiculturel, et je m’y sentais bien. Mais la féérie avait disparu : parfois, des gens s’asseyaient sur le bord de la fenêtre de mon salon pour dealer, et il arrivait aussi que ma femme et moi soyons réveillés par la police qui sonnait chez nous alors qu’elle venait arrêter le voisin du dessous. Les cambriolages étaient aussi fréquents. 

Une caste bloquée au Pays imaginaire

C’est la nature des choses : en grandissant, on guérit des illusions de son enfance et on accède à des réalités plus crues. L’épreuve est souvent douloureuse, mais elle vaut mieux qu’une existence entière à Neverland, le Pays des rêves. Le malheur étant qu’aujourd’hui, la belle ville de Lausanne semble administrée par des gens qui n’ont pas complètement rompu avec la Fée Clochette, Peter Pan et le Capitaine Crochet. Y a-t-il, en effet, un autre univers où des municipaux peuvent se regarder tranquillement dans le miroir avec des salaires indexés à hauteur de +11 et +12k (pour le syndic) le soir-même où des comptes déficitaires (3,5 millions, quand même) sont approuvés par leur législatif ? A part ces grandes banques où faire n’importe quoi débouche sur une prime ou une prudente mutation, je ne vois pas d’autre exemples d’une même obscénité.

Neverland dans un livre de 1911 illustré par Francis Donkin Bedford. On observe que l’argent n’y pousse pas sur les arbres.

Mais oui je sais : dans le privé, on trouve des gens qui n’ont pas le quart des responsabilités du syndic de Lausanne et de son collège et qui gagnent tout autant, voire plus. Mais vu que la gauche nous parle d’exemplarité du secteur public à chaque fois qu’elle accorde de nouveaux privilèges à son administration (congés menstruels, longues semaines de congé paternité, grève des femmes salariée…) que ne donne-t-elle pas l’exemple ? Que ne commence-t-elle pas par demander à ses élus de se serrer la ceinture en tentant de survivre avec le revenu annuel de trois familles normales, sans indexation ?

Petite pause dans ce texte pour vous inviter à soutenir notre travail avec un abonnement au Peuple ou avec un don

Un ami me dit qu’il y a, dans le canton de Vaud, 2% de contribuables (9000 au total donc) qui gagnent davantage que Grégoire Junod et ses camarades. Soit. Mais la vocation du socialisme consiste-t-elle à caler ses avantages sur ceux de l’hyperclasse qu’elle dénonce toute l’année ? Je me souviens d’un slogan qui disait « Pour tous, sans privilèges ». S’est-il transformé en « Nous aussi on a le droit de copier les pires dérives » ?

Et surtout ne changez rien. © Ville de Lausanne – Noura Gauper

Du besoin de morale dans la vie publique

Jusqu’ici, j’imagine que ce texte fait le plein chez mes amis droitards qui seront ravis de pouvoir se faire une Muni de gauche. Mais que l’on ne s’y méprenne pas : mon propos n’est pas partisan. Il est celui d’un chrétien qui ne juge pas concevable qu’une société survive à l’écart d’un sens minimal de la décence. 

Que la morale soit violée dans le public ou le privé ne change rien à l’affaire pour qui n’a pas d’œillère idéologique, mais simplement le sentiment que notre monde est très malade.

« Si tu vois, dans le pays, l’oppression du pauvre, le droit et la justice violés, ne t’étonne pas de tels agissements ; car un grand personnage est couvert par un plus grand, et ceux-là le sont par de plus grands encore. »

Ecclésiaste 5 : 8

Texte issu du blog En enfer il y a…




« Le Tribunal Fédéral a pris une mauvaise décision sur des arguments faibles »

Jean-René Moret, le Tribunal Fédéral a tranché : les autorités genevoises avaient bien le droit de vous interdire de célébrer des baptêmes dans le lac. Quelle a été votre émotion en découvrant ce jugement ?

Principalement de la surprise et de la déception. Jusque-là le Tribunal Fédéral (TF) avait été assez ferme dans sa défense de la liberté religieuse. Avec ce jugement, le TF accepte un système où l’établissement d’une relation avec l’État n’est pas simplement un plus offert aux Églises qui le souhaitent, mais devient un critère en fonction duquel on restreint la liberté religieuse. Ce système est contradictoire avec les principes de laïcité et de séparation de l’Église et de l’État. Il force en effet les organisations religieuse à se rapprocher de l’État, sous peine de voir leur liberté limitée. Il n’était pas prévu par la loi sur la laïcité votée par le peuple, mais instauré par son règlement d’application. Et il n’y a pas de droit à l’établissement d’une relation, le conseil d’État statue sans voie de recours, ce qui n’est pas approprié pour une condition mise à l’exercice d’un droit fondamental. Tout cela, le TF ne l’a pas assez évalué. Le TF accepte aussi que l’État applique aux organisations religieuses des critères qui ne sont pas demandés aux autres usagers du domaine public, et le TF l’accepte simplement parce que la culture genevoise de la laïcité le justifierait. Or un préjugé tenace n’est pas une justification valable pour une inégalité de traitement. Bref, à mon sens le TF a pris une mauvaise décision sur des arguments faibles, et j’attendais autre chose.

Concrètement, comment allez-vous célébrer les baptêmes, désormais ?

Nous allons respecter la loi qui nous impose de les vivre sur le domaine privé, soit en utilisant une piscine privée, soit en montant dans notre église un baptistère mobile (un bassin d’eau permettant l’immersion d’un baptisé).

N’avez-vous pas la tentation de la désobéissance civile ?

À mon sens, la désobéissance civile ne se justifie pas sur la question d’un baptême au Lac. Nous avons un commandement explicite de baptiser les croyants, mais le baptême n’a pas besoin d’être au Lac pour être valide. La désobéissance civile peut se justifier lorsque la loi entre en opposition avec un impératif religieux ou d’humanité, mais ce n’est pas le cas ici.

Jean-René Moret en est convaincu, « s’il est demandé de tous de s’engager à ne jamais enfreindre une loi par motif de conscience, c’est le lit du totalitarisme». © Niels Ackermann /

Si le Canton peut vous interdire ces baptêmes, c’est parce que vous n’entretenez pas de relations officielles avec lui. Pourquoi s’obstiner à ne pas le « reconnaître » en tant qu’autorité légitime ?

Nous reconnaissons tout à fait le Canton comme une autorité légitime, et nous obéissons à ses lois aussi loin que notre conscience nous le permet. Dans l’absolu, je serais très content que nous entretenions avec lui de bonnes relations, et même que cela soit officialisé. Mais la déclaration d’engagement qu’il faut signer pour demander la mise en relation avec l’État comporte le fait de « reconnaître la primauté de l’ordre juridique suisse sur toute obligation religieuse qui lui serait contraire ». Encore une fois, je reconnais sans peine la légitimité de l’ordre juridique et son caractère contraignant. Mais l’idée de primauté sur les obligations religieuses revient à placer l’État au-dessus de Dieu, à en faire non seulement une autorité légitime mais l’autorité ultime. Cela, à mon sens aucun monothéiste conséquent ne peut l’affirmer. Si une norme de l’État venait à être en conflit direct avec un impératif divin, je devrais obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes, quitte à subir les rigueurs de la Loi. Attention, en plaçant la loi de Dieu au-dessus de celle des hommes, je parle de ce qui se passe dans la conscience individuelle, il ne s’agit pas d’établir une théocratie ou de présumer un passe-droit en fonction de nos convictions religieuses. 

Une autre manière de le dire, c’est que cette disposition demande de renier toute éventualité de désobéissance civile motivée religieusement. Un Martin Luther King ne pourrait pas signer cela ! Motivé par sa foi de pasteur baptiste, il a enfreint les lois de son lieu et de son temps pour obtenir qu’elles soient davantage conforme à un idéal supérieur. 

De fait, je pense que chacun, quelles que soient ses convictions, peut penser à des actes qu’il ne ferait pas même si l’État le lui imposait, ou qu’il ferait même si l’État le lui interdisait. S’il est demandé de tous de s’engager à ne jamais enfreindre une loi par motif de conscience, c’est le lit du totalitarisme. Si ce n’est demandé que des religieux, c’est de la discrimination pure et simple.

Cette volonté de séparation d’avec le politique est souvent très présente dans les milieux évangéliques. N’est-elle toutefois pas un peu datée alors que Google ou Facebook ont plus de pouvoir sur nous que nos élus ?  

Le principe de séparation de l’Église et de l’État est toujours pertinent et toujours nécessaire. Une Église adossée au pouvoir politique finit toujours par adapter son message ou sa pratique aux réalités politiques, et par porter le poids des errances du politique. Théologiquement, l’Église est  une communauté de croyants, qui reconnaissent Jésus-Christ comme sauveur et Seigneur, adaptent l’entier de leur vie à son enseignement, et reçoivent l’aide de l’Esprit de Dieu pour vivre une vie nouvelle. Appliquer les mêmes principes à la communauté civile, pluraliste, est irréaliste et absurde. Quant à forcer toute la population à être chrétienne ou à la présumer telle, ce n’est pas ce que Jésus enseigne et cela crée de l’hypocrisie et de l’amertume. Il peut être tentant d’utiliser un pouvoir humain pour faire avancer le Royaume de Dieu, mais cela transforme ce dernier une affaire toute humaine, trop humaine. L’État et l’Église doivent être indépendants, c’est le mieux pour les deux. Cela reste le cas quel que soit le pouvoir des GAFA (Google Apple Facebook Amazon), l’Église ne s’affranchira pas des multinationales en courant dans les jupes de l’État. Mais il y a certes une réflexion à mener sur une résistance intellectuelle et spirituelle au pouvoir des Big Techs.


« Une Église adossée au pouvoir politique finit toujours par adapter son message ou sa pratique aux réalités politiques, et par porter le poids des errances du politique. »

— Jean-René Moret, pasteur


Placer la loi de Dieu au-dessus des hommes est une belle chose quand on fait face au nazisme. Est-ce que cela a vraiment du sens en Suisse ?

Bien sûr on ne s’attend a priori pas à ce que la Suisse prenne une tournure totalitaire, et loin de moi de lui prêter l’intention de commettre des crimes contre l’humanité. En même temps, un principe qui est bon et juste doit être maintenu, même s’il nous gêne et ne nous apporte apparemment rien. Il y a quelque chose de présomptueux à penser que notre pays ou notre ordre juridique seraient tellement bons, tellement peu susceptibles de dérives qu’on pourrait leur donner une primauté qu’on refuserait à un autre pays ou à un autre régime. Du reste, nous traitons en héros les Suisses qui ont fait traverser illégalement la frontière à des Juifs lors de la seconde guerre mondiale. Or ils enfreignaient une loi Suisse, dûment avalisée par les instances démocratiquement élues.

On dira peut-être qu’il est plus légitime de désobéir à la loi Nazie qu’à la loi Suisse parce que la loi Suisse est meilleure. Mais en disant qu’elle est meilleure, on la juge par un autre critère que le seul fait d’être la loi établie du pays. Si la Loi est la référence ultime du simple fait qu’elle est la loi du pays, on ne peut plus se plaindre qu’une loi est injuste et il n’y a plus de différence de valeur entre la loi Suisse, celle du troisième Reich, des USA ou de la Corée du Nord. De plus, le point de référence ne peut pas être une simple question de consensus, sinon le consensus nazi vaut bien le consensus suisse ou celui des droits de l’homme. À mon sens tout cela nécessite une base objective supra-humaine pour évaluer la justice et le droit, base qui se trouve en Dieu et dans sa volonté. Du reste, la constitution suisse reconnaît ce fait avec son invocation «Au nom du Dieu tout Puissant», même si notre pays fait bien des choses auxquelles il vaudrait mieux ne pas mêler le nom de Dieu.

Il y a quelque chose de piquant à ce que refuser de renier ce même fait soit un motif de voir ses droits restreints !

De manière générale, sentez-vous une défiance exagérée vis-à-vis du monde chrétien évangélique dans la société ?

Le monde évangélique a tendance à avoir mauvaise presse. Beaucoup de reportages aiment mettre du piment en faisant ressortir le pire de ce qui peut s’être fait ou dit dans le milieu évangélique. Les évangéliques sont aussi parfois attaqués pour montrer qu’on ne vise pas que les islamistes.

À l’inverse, je crois que ceux qui peuvent connaître les évangéliques dans leur réalité se rendent compte qu’ils sont des partenaires tout à fait valable et une composante utile de la société. Il peut y avoir des dérives comme dans tous milieux, et l’attachement évangélique à la Bible les empêche de suivre tous les courants de pensées à la mode. Mais en tout, chacun gagnerait à connaître concrètement des évangéliques plutôt que de se baser sur des clichés et des reportages choc.

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La résistance sans l’extrémisme

« Je ne croyais pas tes édits assez puissants 
Pour forcer les mortels à fouler aux pieds 
Les lois non écrites et immuables des dieux. 
Elles ne datent ni d’aujourd’hui ni d’hier, 
Elles sont éternelles, nul ne sait quand elles parurent. »

Les amateurs de tragédie antique reconnaîtront ici la révolte d’Antigone face au roi de Thèbes, Créon. Pour rappel, l’héroïne de Sophocle y combat un décret qui impose que le corps de son frère soit livré aux bêtes pour avoir pris les armes contre sa cité. À quelle loi obéir ? Celle d’un homme ou celle des Dieux qui exigent qu’un défunt, quel qu’il soit, ait droit aux honneurs ? A cette question, Antigone répond par la fidélité aux vérités les plus hautes, celles de la foi. Quitte à tout perdre. 

Des rebelles par fidélité, la foi chrétienne en a aussi connus beaucoup à travers les siècles, à commencer par sa figure fondatrice, le Christ. Aujourd’hui, toutefois, bien des chrétiens semblent se satisfaire d’un rôle consistant à bénir n’importe quelle décision du politique, pourvu qu’elle semble aller dans le sens du « progrès ». Heureusement certaines Églises, évangéliques notamment, résistent et ne se soumettent pas d’office à l’État. Non pas qu’elles soient extrémistes, mais parce qu’elles restent fidèles à des Écritures qu’elles n’ont pas dénaturées à grands coups d’exégèse historico-critique. On le leur fait bien payer, autant dans les médias que – et c’est nouveau – dans les tribunaux. 

Merci à ces chrétiens de rappeler que l’État, quel qu’il soit, ne doit jamais devenir l’autorité ultime. 
RP




Démocratie directe

Les Suisses se gargarisent du concept de « démocratie directe ». En réalité, il s’agit d’une démocratie semi-directe où le pouvoir des représentants du peuple est limité par le référendum d’initiative populaire, pour empêcher l’entrée en vigueur d’une loi ou d’un traité, ou par l’initiative populaire en matière constitutionnelle, qui a surtout abouti à ce que la Constitution fédérale contienne des dispositions indignes d’une constitution et qui sont en réalité de nature législative (de la construction des résidences secondaires au paiement d’une treizième rente mensuelle aux retraités). Bien entendu, par rapport à la France, où l’article 3 alinéa 1 de la Constitution du 4 octobre 1958 (qui dispose que l peuple exerce sa souveraineté par ses représentants et par la voie du référendum) est constamment violé depuis le départ du général de Gaulle (4 référendums en 10 ans sous sa présidence ; 0 référendum sous Sarkozy, Hollande et Macron), la Suisse apparaît comme bien lotie. Notons toutefois que certains pays connaissent des instruments de contrôle populaire bien plus raffinés encore : le référendum abrogatif en Italie, qui permet d’attaquer une loi déjà entrée en vigueur (et même depuis plusieurs années), et le droit de rappel dans plusieurs États américains, qui permet de révoquer le pouvoir exécutif avant le terme de son mandat.

Un viol permanent des consciences

Le principal parti attaché à la défense de la « démocratie directe » (en fait semi-directe) est l’Union démocratique du centre, qui a d’autant plus de mérite à le faire que son statut de minorité la condamne en général à échouer quand elle lance une initiative. Il est vrai aussi que l’électeur suisse votait autrefois selon des considérations politiques. Cela n’a plus guère cours aujourd’hui que nous assistons à un viol permanent des consciences par les médias de grand chemin qui, en Suisse, penchent à peu près tous dans le même sens. C’est ainsi que le vote insensé du canton de Genève sur le salaire minimum non négocié à indexation automatique sur l’inflation du 27 septembre 2020 fut précédé d’une intense mise en scène télévisuelle à propos de la « précarité » qui allait disparaître comme par magie après l’introduction de cette norme. N’importe quel étudiant de première année d’économie aurait pu expliquer que cela allait, au contraire, renforcer la pauvreté. Mais il va de soi que, pas plus dans ce domaine qu’en politique étrangère, la raison n’a droit de cité. Trois ans et demi plus tard, on constate, comme on pouvait le prévoir, que la « précarité » a augmenté et qu’elle touche de plus en plus les jeunes. Ce qui est normal, puisque c’est la conséquence automatique de l’introduction de ce genre de dispositions. 

Une décision du peuple qui n’a pas exactement effacé la précarité.

Autrefois, on savait que le recours à la souveraineté du peuple avait l’avantage de mettre en échec les pressions, les menaces, les violences qui pouvaient s’exercer contre une assemblée délibérative. C’est ainsi que, lors du procès de Louis XVI, ceux des conventionnels qui voulaient sauver le Roi, constatant que les députés étaient terrorisés par les sans-culottes qui s’agitaient dans les tribunes, avaient en vain demandé que le jugement de la Convention fût ratifié par le peuple, proposition rejetée le 15 janvier 1793 par 423 voix contre 286.

Aujourd’hui, la situation est radicalement différente. C’est sans doute le représentant du peuple qui est libre. Ne serait-ce que, surtout dans les pays qui connaissent la bienfaisante proportionnelle, les élus des divers partis travaillent ensemble dans tant de commissions et de comités qu’ils ont un minimum d’égards les uns pour les autres. L’électeur, lui, se souvient jusque dans le secret de l’isoloir du « bon vote » qui lui a été martelé par la télévision et la radio. Les humains les plus conditionnés de l’Histoire, comme disait Jules Monnerot… Le formatage médiatique permanent a transformé le vote populaire, qui était un frein aux excès, qui était la voix du bon sens, en une course en avant. À voir les mines réjouies de certains électeurs qui ont voté contre toute logique et même contre leur propre intérêt, je me demande s’ils croient vraiment qu’un journaliste de la télévision d’État va venir leur donner une médaille en chocolat pour avoir voté « progressiste ».

Une démocratie directe de moins en moins directe

Ceci étant, la vraie démocratie directe, l’absence de corps délibératif, le contact direct entre l’exécutif et les électeurs, ceci existe dans certains cantons suisses au niveau communal.  Voici un exemple concret que j’ai vu fonctionner dans mon village de résidence en Valais.

Il est vrai que le village n’en est plus un, puisqu’à force de fusions de communes, il est arrivé à compter 5’733 électeurs inscrits à la date du 3 mars 2024. Retenons bien ce chiffre : 5’733.

Me voici convoqué, un certain soir de novembre, à l’assemblée primaire qui doit délibérer d’une question vitale pour l’avenir de la commune. Mais vraiment vitale. Je me dois donc de soutenir l’exécutif communal. Je m’en vais ainsi vivre la vraie démocratie directe, telle un Athénien sous Périclès ou un Appenzellois sous Raymond Broger. « La liberté des Anciens », aurait dit Benjamin Constant. Premier problème : il faut bien que quelqu’un se dévoue pour garder les enfants. Horresco referens… Madame se sacrifie (là, j’ai l’impression de faire un aveu qui va me condamner à mort). J’ai tout à coup l’impression que la démocratie directe, c’est un système qui favorise ceux qui n’ont pas d’enfants. Doublement automatique de leur poids électoral. On est loin du vote familial.

Deuxième problème : un soir de novembre, dans les montagnes, on ne va pas tenir une assemblée primaire communale dans la prairie du Grütli. La commune a prévu une salle. Contenance : 500 personnes. 500 places pour 5’733 électeurs inscrits ? On prévoit dès le départ plus de 90% d’abstentions ? L’exercice démocratique est réservé aux plus endurants ?

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La première question à l’ordre du jour est capitale pour l’avenir de la commune. Comme la commune est relativement riche – enfin, riche pour un village valaisan -, elle n’a pas tendance à voter pour les formations politiques qui distribuent les subventions. (En fait, c’est plutôt mon village qui subventionne les villes de la plaine.) Comme par hasard, c’est surtout les représentants de ces formations que je vais devoir entendre pendant toute la soirée critiquer la proposition de l’exécutif communal sans avoir rien à proposer en rechange.

Au bout de quoi… trois heures, un peu plus, un peu moins, d’attaques contre l’exécutif communal, on finit par voter et le hasard fait que la proposition absolument salvatrice pour l’avenir de la commune finit par être adoptée. Peut-être que la minorité qui adhère aux partis distributeurs de la manne étatique n’a pas si bien réussi à prendre en main la composition de l’assistance. Mais je ne peux m’empêcher de me poser une question : qu’est-ce qui garantit, avec une participation de 500 électeurs sur 5’733 inscrits, qu’un parti qui représenterait 5% de l’électorat communal ne puisse s’arroger la majorité à une prochaine assemblée primaire ? Ailleurs, on bourre les urnes ; ici, on pourrait bien bourrer les salles.

Il est 23 heures et il reste trois autres points à l’ordre du jour. J’ai une famille et un boulot. Je ne vais pas rester toute la nuit pour participer au vote. Je me vois forcé de rentrer piteusement chez moi. L’exercice de mes droits de démocrate athénien s’arrêtera donc là.

Je me pose toutefois une question. En quoi l’exercice que je viens de vivre est-il plus démocratique qu’un vote d’un conseil municipal élu, avec un éventuel droit de référendum ?

Je doute donc que la démocratie directe soit plus démocratique que la semi-directe, elle-même de moins en moins démocratique, et de plus en plus conditionnée.

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« Cette dégénérescence qui nous guette »

‘Ce petit mot d’une modeste habitante qui, nonobstant l’ambiance générale, ose dire que d’autoriser conjointement le burkini et les seins nus est un signe de faiblesse pour, espérez-vous, la tranquillité des esprits !!!’ 

Voici l’entrée en matière du mail que j’ai reçu de la part d’une citoyenne vaudoise. Evidemment, je ne peux qu’apprécier la lecture de ces mots. La suite me plaît tout autant. 

‘Cette lâcheté, dans ce domaine comme dans d’autres d’ailleurs (écoles, universités ou ailleurs qui a cours lorsqu’on ne sévit plus, de crainte de représailles sans doute (…?)), est un triste indicateur de faiblesse qui, à l’évidence, ne fait que repousser encore et encore les curseurs de la « tolérance » qui bientôt signeront la fin de notre identité.’

Comme je suis d’accord avec vous ! Comme je comprends votre ressenti ! Comme je le partage ! Autoriser les burkinis et les seins nus en même temps, le problème est donc réglé. Mais quel problème au juste ? Que vient faire le burkini dans nos piscines ? Au nom de la tolérance, de l’inclusivité, du wokisme, de la multiculturalité, la norme est désormais de faire comme chacun le souhaite. Des vestiaires mixtes seront à disposition, mais la nudité y est interdite. Le principe même d’un vestiaire est de pouvoir s’y changer. A moins que, là aussi, cette utilité soit désormais revue. 

Je me rappelle cette scène désagréable lorsque je travaillais encore dans les soins : j’ai dû retirer la petite croix que je porte en pendentif pour ne pas ‘gêner’ les patients d’autres religions. Ne pas froisser les dames qui portent un voile, dans mon pays. C’était donc à moi de m’adapter. 

Pourquoi sommes-nous à ce point incapables de dire NON ! Avant, lorsque nous allions à la piscine, nous mettions un maillot de bain, nous avions un soupçon de pudeur et nous passions nos après-midis ensemble, filles et garçons. Pourquoi faut-il, à ce point, perdre notre identité ? 

Pour revenir à l’échange que j’ai eu avec cette dame, je l’ai invitée à exprimer son message dans les médias. 

‘La presse, c’est peine perdue car j’ai déjà essayé, en vain, auprès du journal Femina et sur leurs sujets sur la sexualité assortis d’une ébauche explicite de dessin. Même si nos plus jeunes enfants ne savent pas encore lire, ils peuvent à contrario fort bien interpréter le dessin qui illustre le propos sexuel, évidemment prosélyte !

Nos médias feraient donc un tri de ce qu’ils veulent bien relayer venant des lecteurs ? Pire ! Nos médias nous nourrissent, encore et encore, avec l’inclusion, le wokisme, la grève des femmes, la communauté LGBTQIA+, jusqu’à l’overdose et malheureusement jusqu’à l’exaspération. 

Pourquoi quand Nemo gagne l’Eurovision, la seule inquiétude est de savoir ce que l’on (le secrétariat cantonal de l’UDC Vaud) pense de cette personne ? Pas une seule fois, on s’est intéressé à notre avis sur la prestation artistique. Est-ce ‘la Suisse’ qui a remporté ce concours ou la culture woke et le 3ème sexe ? Pourquoi vouloir systématiquement nous emmener sur le terrain des sujets énumérés plus haut. 

Que reste-il de notre culture ? De nos racines ? Devrais-je avoir honte d’être blanche, hétérosexuelle et chrétienne ?  Apprécier la compagnie autant des messieurs que des dames, être à l’aise dans ma féminité et l’assumer font-ils de moi une personne rétrograde ? J’ose croire que non. J’en suis même parfaitement convaincue. La majorité est silencieuse mais n’en pense pas moins. Je le constate jour après jour au travers des mails reçus d’une population irritée. 

‘Je vous souhaite courage et une détermination sans faille pour faire face à cette dégénérescence qui nous guette’.

Oui madame ! Je vais avoir du courage ! Je vais relayer votre message qui est également celui d’une grande partie de la population de ce canton et de ce pays. Battons-nous pour conserver nos valeurs ! Exigeons que nos coutumes et notre identité restent nos priorités. 

Floriane Gonet
Secrétaire générale de l’UDC Vaud

Sur la victoire de Nemo

Notre édito : https://lepeuple.ch/nemo-erectus/

Notre vidéo :