Apprendre à lire « 20 minutes »

Ou comment un article apparemment neutre fait passer les végans pour des génies et les agriculteurs pour des sauvages.

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« Véganes et viandards peuvent-ils enterrer la hache de guerre ? » Déjà décortiqué sur notre chaîne YouTube, l’article publié sous ce titre méritait bien aussi sa place dans notre édition. Rédigé par un ex-collègue végétarien (voire végan), selon nos souvenirs, le papier évoque une émission de la RTS, Week-end à la ferme, qui a réuni chasseurs, bouchers, agriculteurs et végans. Le but du jeu : favoriser un rapprochement en utilisant des codes de téléréalité.

Mais pour 20 minutes, l’opposition semble trop forte dès le début, puisque le journaliste évoque dans son chapô la réunion de « personnes aux convictions opposées sur le bien-être animal ». Première affirmation en creux : un omnivore se contrefiche par nature des questions éthiques concernant nos amies les bêtes.


D’ailleurs, plutôt qu’omnivore, les personnes lambda sont tour à tour qualifiées de « viandards », « carnivores » ou « carnistes ». Subrepticement amenée, là encore, l’affirmation d’une sauvagerie inhérente à la consommation de produits d’origine animale.

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Deuxième biais remarquable de l’article : la manière dont la militante antispéciste Virginia Markus « explique » deux fois telle ou telle chose au lecteur dans ses diverses citations, tandis qu’un agriculteur « grogne » (sic) son opposition au véganisme. Spectaculaire tour de passe-passe : la personne qui représente la majorité de la population, à 95 % omnivore, est présentée comme extrémiste, tandis que celle qui porte les couleurs des 0,7 % de végans est placée en situation d’autorité. Pire, quand l’agriculteur dit son souci de faire son métier correctement, il « prétend » faire attention au bien-être animal, glisse le journaliste.

Le propos de ce petit texte n’est pas de démonter point par point telle ou telle idéologie, en particulier alors que l’émission dont il est question vise au rapprochement. Il s’agit de glisser une astuce de lecture : si vous voulez savoir ce qu’un journaliste veut vous faire avaler, regardez comment il qualifie les citations des uns et des autres. Vous serez surpris de découvrir un journalisme supposément neutre qui encense les marges et diabolise les agriculteurs qui nourrissent notre pays.

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