Un « Comité Trump Suisse » organise des dîners pour promouvoir la doctrine du président américain. Le prochain aura lieu malgré l’affaire des taxes.
Nous sommes à la fin du mois de mai, dans une brasserie élégante d’une ville de l’Arc jurassien. Ce soir, des « trumpistes » suisses et français vont se retrouver autour d’un repas dans un salon privé, sous l’autorité paisible d’un vieux routier de la droite identitaire française, Georges Clément. Curieuse collision des mondes : d’un côté, plusieurs jeunes politiciens au style très zemmourien, cravate impeccable, bien coiffés ; de l’autre, des élus helvétiques parfois plus indisciplinés, même si la plupart portent tout de même le veston. Lutte contre le « wokisme », défense de la foi chrétienne, maîtrise des frontières… Tous les grands thèmes y passent. En bilatérale, certains convives avouent préférer les idées du président américain au style avec lequel il les défend, mais l’ambiance « droitarde » permet de trouver le terrain commun sans friction.
En fin d’année, le « Comité Trump Suisse » aux manettes de ces événements remettra le couvert pour « un moment convivial, où l’amitié et la réflexion politique se conjuguent ». Trois thèmes d’actualité seront communiqués aux invités dans la préparation de l’événement et le carton d’invitation virtuel appelle à « un esprit de fraternité et de discussion libre ».
Des remous
Seulement, depuis l’envoi des invitations en juillet, une météorite est tombée sur la Suisse : les taux de taxes douanières de 39 %. Un choc qui conduit par exemple le conseiller fédéral UDC Albert Rösti, enthousiaste de la première heure, à ne plus vouloir prononcer le nom du président américain. Dans un article publié mi-août par Blick, Rösti affirme qu’il voterait encore pour le Parti républicain, mais évite désormais toute référence directe à Donald Trump. Il juge même que les tarifs imposés par son ex-poulain sont « l’opposé du libéralisme ». Déjà en avril, dans un podcast, il avait laissé filtrer des critiques : attaché à l’idée républicaine, il estimait que ce que Trump faisait avec les droits de douane « n’avait plus rien à voir avec cela ».
Si Albert Rösti prend de la distance, Christoph Blocher, lui, prend de la hauteur. La figure tutélaire de l’UDC et ancien conseiller confédéral replace ainsi l’affaire dans le temps long, dans le Tages-Anzeiger : « Avec les Américains, il y a toujours eu des problèmes, même s’ils affirment toujours être nos amis. Il suffit de penser aux “avoirs en déshérence” pour lesquels nous avons dû payer plus d’un milliard. » Et de conclure, serein : « Nous sommes toujours sortis renforcés de ce genre de crises. »
Trump en bredzon
Trumpiste et Suisse, serait-ce en train de devenir un oxymore ? Tel n’est pas l’avis de notre Comité Trump Suisse. Sur Instagram, où il est très actif, ce dernier publiait même une image du président américain en armailli à l’occasion du 1er Août, en pleine onde de choc liée aux nouvelles taxes. Un milliardaire new-yorkais, coiffé comme un armailli, en plein cœur d’une tempête commerciale ? Osé, assurément, mais pour ces inconditionnels, la responsabilité du coup de massue revient à nos élus, et pas à leur héros : « Cet échec n’est pas une erreur, c’est une stratégie : affaiblir nos liens avec les États-Unis pour mieux nous pousser dans les bras de l’Union européenne », avancent-ils même face aux critiques, venues parfois de droite.

N’y a-t-il pas pour autant des personnalités devenues réticentes à se joindre à leurs futurs repas-débats ? « Non absolument aucune réaction négative », jure le comité, « car le trumpisme suisse est axé particulièrement sur des sujets comme l’immigration, le wokisme, l’extrémisme de gauche, la souveraineté, les valeurs chrétiennes et le patriotisme. Tous des points de référence qui plaisent ici en Europe. »
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