Il faut s’imaginer un lundi matin d’août, du côté du célèbre Jardin japonais de la Cité thermale. À peine la voiture parquée, un petit groupe de dealers interrompt sa discussion pour nous regarder fixement. Hélas, une famille assez peu arc-en-ciel sort de l’habitacle, et nos acteurs du vivre-ensemble, sans doute contrariés, retournent à leurs précieuses transactions interculturelles.
Un autre vendeur, seul, est en train de tuer le temps sur un banc, près des gouilles du parc. Gêné dans sa lecture de la Critique de la raison pure, il grogne en réalisant que nous sortons le téléphone pour prendre une photo dans sa direction. Mais il se rassure vite : notre fascination ne le concerne pas, mais plutôt une affiche pétante qui nous demande, sans préliminaire : « Quel animal préfères-tu ? » Réponse : les vaches, peut-être, que nous semblons avoir gardé ensemble… Malheureusement, deux autres options s’offrent à nous : chats ou chiens, avec les poubelles correspondantes. En bas de l’affiche, cette injonction, toujours en « tu » : « Aide-nous à garder la Suisse propre. »
Promis, je ne mettrai pas ma coke dans l’étang.
Le procédé n’est pas nouveau : inciter les passants à jeter leurs déchets en fonction de leur réponse à un sondage express. Longtemps, il a fait l’amusement des fumeurs et – faut-il croire – la joie des nettoyeurs de rue. Mais il nous hante, dans le cas du centre d’Yverdon-les-Bains : pourquoi vouloir à ce point recréer l’Île aux enfants dans l’un des espaces les plus défavorablement connus de la ville ? Doit-on attendre du « fun » et de la familiarité des services communaux, ou le droit de ne pas s’encaisser des criminels au quotidien ?
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