Crise à la police de Lausanne : les agents livrent leurs pistes

Au lieu de donner la parole aux "experts", nous avons posé une question toute simple à de nombreux agents : "Si vous pouviez prendre ne serait-ce qu'une seule mesure..." (Photo: FB/Police Municipale de Lausanne)

Depuis dix jours, la Police Municipale de Lausanne traverse une violente tempête. La dénonciation par la Municipalité d’un « racisme systémique », dans un contexte d’émeutes urbaines, a fissuré la confiance, exacerbé les tensions et ouvert une crise sans précédent. Dans ce climat, des agents ont accepté de témoigner anonymement. Leurs voix, parfois dissonantes, dessinent une mosaïque de propositions, d’exaspérations et d’espoirs. Elles témoignent aussi d’une souffrance au travail qu’on néglige trop souvent.

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Faire le tri. Pour certains interlocuteurs, le premier pas serait de revoir l’organisation interne. « Mettre les bonnes personnes au bon endroit », résume un agent un peu revanchard, qui dénonce des profils déplacés, rétrogradés, puis recasés à la tête de services « plus ou moins fantômes ». Selon lui, seule une réforme courageuse, y compris par le licenciement, permettrait d’assainir la situation : « Il faut y aller plus franchement, comme dans le privé. » Mais d’autres rétorquent aussitôt qu’« ici, c’est une administration » : on ne peut pas congédier sans motif, surtout dans une ville tenue par la gauche. Et surtout, ajoute un observateur, ceux d’en bas, quand ils échouent, « trouvent toujours une excuse en se réfugiant derrière le terrain ».

Mettre le politique face à ses contradictions. Plusieurs voix insistent : il faudrait obliger les élus à assumer les conséquences de leurs décisions. Certains imaginent une forme de boycott, « ne plus répondre qu’aux appels d’urgence » et laisser les responsables politiques « décider eux-mêmes ce qu’ils feront sans nous ». L’idée n’est pas qu’une bravade : « Ce serait une bonne manière de leur rappeler que c’est eux qui donnent les orientations, pas nous », glisse un policier. D’autres plaident pour une clarification écrite : « Une lettre qui rappelle noir sur blanc nos missions, même quand elles sont politiquement crispées, serait utile. Qu’on sache si oui ou non on veut qu’on arrête des dealers dans la rue, malgré le fait que beaucoup soient originaires d’Afrique. »

Cette image d’un élu tricotant durant le Conseil communal de Lausanne a été partagée à l’interne par plusieurs agents. Elle révèle selon eux un “je-m’en-foutisme d’une classe d’élus qui ne se privent pourtant pas de leur donner des leçons de professionnalisme.


Réguler les élus eux-mêmes. Le ressentiment est profond face à des propos jugés humiliants, au sein des organes législatifs. « Quand des conseillers postent des slogans ACAB ou des caricatures antiflics, on ressent ça comme un véritable appel à la haine », confie un policier. L’idée d’une charte pour les représentants revient. Le ton se fait amer en évoquant une déconnexion quasi-totale entre des mondes qui ne se comprennent plus : « En décembre, on a vu un élu tricoter pendant le conseil communal. Alors, d’accord, la cravate n’est plus obligatoire, mais à ce niveau, c’est du foutage de gueule. Et ce sont ces gens, qui semblent avoir tous les droits, qui nous donnent des leçons ? »

Limiter l’ingérence de l’exécutif. 

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