Stop ! On en a marre !
Ils en ont marre, et ils le disent. Le message, désormais, n’est plus seulement visible sur la devanture de leurs magasins, mais sur des panneaux d’affichage de l’hypercentre lausannois. Les commerces de la capitale olympique ont décidé d’intensifier leur campagne contre la politique de la majorité rose-verte lausannoise après des années de chasse à la bagnole, de permissivité à l’égard des autres utilisateurs de la route (et des trottoirs), de mendicité agressive et d’insécurité. Bref : le quotidien merveilleux qu’on nous vend comme « modernité urbaine », avec ses trottinettes folles et ses dealers éternels.
Message important: ce texte vous est offert par sympathie pour la cause des commerçants mais nous avons besoin de vous pour continuer à jouer notre rôle d’empêcheur de penser en rond.
Abonnements : https://lepeuple.ch/sabonner/
Dons : https://lepeuple.ch/nous-soutenir/
Notre guide de l’écriture journalistique (5 CHF): https://lepeuple.ch/librairie-du-peuple/le-manuel-de-lecriture-journalistique/
Notre manuel de survie médiatique (9.90 CHF): https://lepeuple.ch/librairie-du-peuple/le-manuel-de-survie-mediatique/
Dès l’émergence du mouvement des commerçants, de belles âmes ont ironisé : voilà la droite qui lance sa campagne communale avec des moyens détournés ! C’est souvent comme ça qu’on procède quand on tente de diaboliser un mouvement né de la base, autrement dit du peuple. Seul petit souci avec cette caricature : le mouvement, spontané, refuse toute coloration politique et s’en tient à des considérations purement professionnelles. Pas de grand complot électoral derrière, juste des gens qui bossent et qui, ô surprise, veulent continuer à travailler dans une ville vivable.

Prenons l’exemple de Luc Geny, pharmacien de la rue du Petit-Chêne. En 2008, ce Toulousain au bel accent chantant quitte son pays, dégoûté par l’oppression fiscale subie par ceux qui se lèvent le matin et témoin direct de la montée d’une insécurité faite de home-jackings ou d’agressions en pleine rue. Vingt ans plus tard, ce Lausannois résume, amer : « Malheureusement, ce qui m’a poussé à quitter la France arrive aujourd’hui en Suisse. » On a importé le pire… mais sans le cassoulet.
Un «dépotoir»
Cédric Abikzer, de la Boutique Allure, travaille quant à lui dans le vestimentaire haut de gamme, pile en face du Palace. Selon lui, les jours sombres ont commencé bien avant la grogne actuelle contre la politique lausannoise, déjà avec la fin du secret bancaire et la crise des subprimes. « Malheureusement, la ville est aussi devenue un véritable dépotoir, et les chicanes à la mobilité gênent mes clients, qui sont 95 % à se déplacer en voiture. » Résultat : pour continuer, il se déplace de plus en plus chez eux — donc la plupart du temps hors de Lausanne. Subrepticement, son commerce quitte peu à peu le rôle de boutique avec pignon sur rue pour endosser celui de société de services. On appelle ça du « développement durable » : vider le centre pour mieux le préserver…

Depuis quelques semaines, Le Peuple s’est transformé en compagnon de route des commerces lausannois. Leur colère et leur sentiment d’abandon ne sont pas une ruse partisane pour mettre un camp en avant plus qu’un autre, mais l’expression d’un réel désarroi. Nous nous félicitons de servir, à l’avenir, de relais à leurs revendications, exprimées sur le site commercants-en-action.ch.
Et voilà que, miracle ! À quelques mois des élections, la Ville semble enfin les entendre. « Consciente de l’importance de ses commerces de proximité et des défis qu’ils rencontrent », elle présentera vendredi prochain le déploiement d’« un plan d’action ambitieux pour soutenir le tissu commercial et renforcer l’attractivité de Lausanne et de son centre-ville. » Comme quoi, il existe bien une potion magique : la grogne populaire. Elle rend sourds pendant des années… puis, soudain, elle ouvre grand les oreilles à l’approche des urnes.
Curieux empressement, décidément. Mais réjouissons-nous : si Lausanne continue de se vider de ses boutiques, il restera toujours de la place pour accrocher les affiches municipales.

