Cher Loris Socchi…

Vos récentes frasques au Conseil communal lausannois, tout d’ACAB (« Tous les flics sont des bâtards », pour les non-anglophones) vêtu, m’ont replongé dans de vieux souvenirs de Grèves du climat. En 2019, à 19 ans, vous posiez dans L’Illustré comme apprenti laborantin en biologie, Robespierre de la météo, prêt à vous « enchaîner aux portes du Palais fédéral ». Vous étiez l’interlocuteur de la police pour négocier les trajets de manifestation. Alors je me demande : déjà à l’époque, leur lanciez-vous des « enfoirés » entre deux discussions sur les sens interdits ? Vous allez sans doute être surpris, mais je vous crois trop gentil pour ça.

Message important !
Ce billet vous est offert parce que quelqu’un doit bien dire les choses, mais nous avons besoin de vous pour continuer à jouer notre rôle d’empêcheur de penser en rond. 
Abonnements : https://lepeuple.ch/sabonner/
Dons : https://lepeuple.ch/nous-soutenir/

! Nouveau ! Notre manuel de survie médiatique (9.90 CHF) : https://lepeuple.ch/librairie-du-peuple/

Six ans ont passé. Vous avez 26 ans depuis le mois de juin. L’âge où certains finissent leurs études, d’autres lancent une entreprise, d’autres encore élèvent des enfants. Et vous, vous volez des rideaux chez Ikea « pour un logement d’urgence », puis vous prenez la fuite comme un collégien qui a piqué des bonbons. Voilà tout le paradoxe : le grand geste politique proclamé… réduit à une course honteuse dans les couloirs d’un magasin. Vous rêviez d’embraser les foules, vous avez déclenché l’alarme antivol. On attendait le révolutionnaire prêt à s’enchaîner aux grilles du Palais fédéral, on découvre le Che Guevara d’Aubonne, spécialiste du demi-tour à la caisse.

Le serment oublié

Votre radicalité intrigue : elle ressemble moins à un combat assumé qu’à une adolescence prolongée. Vous voulez provoquer, mais toujours en gardant la porte de sortie : « maladresse », « mal compris », « habits de tous les jours ». C’est la rébellion en coton bio, lavable à 30°. Vous vous défendez comme un ado rebelle qui révise quand même son bac. Sauf que dans votre cas, le diplôme convoité, c’est le feu des projecteurs. Jouer les marginaux en séance plénière, avec l’assentiment d’un micro et d’un ordre du jour, comprenez que ça puisse agacer.

Et il y a plus grave : en prêtant serment pour devenir conseiller communal, vous vous êtes engagé à représenter l’ensemble de la population et à respecter les institutions. Arborez donc ce que vous voulez à la maison, mais dans l’enceinte démocratique où vous avez été élu, un t-shirt ACAB n’est pas une opinion, c’est une violation de votre propre parole. Quand on choisit de siéger, on ne peut pas jouer en permanence les marginaux — et encore moins insulter ceux qu’on a juré de représenter.

Le problème, c’est que la collectivité paie vos contradictions. Quand Le Parisien parle de Lausanne, j’aimerais que ce soit pour la Fondation de l’Hermitage, pour la cathédrale ou pour l’élégance de ses commerces. Pas pour un élu communal qui insulte la police en séance et vole des rideaux au nom de la révolution.

Lausanne mérite mieux. Et vous aussi, vous valez mieux que ce rôle de Gavroche en goguette, coincé entre l’adolescence et la carrière politique.

Respectueusement vôtre,
Raphaël, un ancien Lausannois mi-amusé, mi-navré.

Un élu avec un T-shirt ACAB

Pour visualiser les résultats, vous devez être connecté ou vous devez renseigner votre adresse email.

Voir aussi