GPT, responsabilité et darwinisme des médias

Quelle forme prendra la rédaction du futur, avec l’émergence de l’intelligence artificielle ? Notre chroniqueur Jean-Pierre Seyne livre son regard d’ingénieur.

Si nous sommes libres de dire ce que nous souhaitons, c’est parce que nous avons également des responsabilités. Animaux sociaux, les hommes communiquent dans le cadre d’une organisation : la société, qui leur permet d’être relativement libres en fonction des époques. Cette liberté est rendue possible parce que les hommes doivent naturellement rendre compte de leurs propos. Si ces derniers sont faux, erronés, offensifs ou diffamatoires, alors c’est l’image de l’auteur, sa réputation, voire ses droits civiques qui peuvent être atteints. Pour cela, la justice est censée faire régner un certain ordre. Même si ce n’est pas complètement le cas comme en témoigne l’actionnariat des principaux médias. 

Ce qui change, avec l’arrivée de GPT, c’est la facilité pour n’importe qui d’écrire sur un sujet particulier. Est-ce que cela remet en cause tout le principe de responsabilité ? Non.

En revanche, cela entraîne une nouvelle forme de gestion de ce principe moral et légal. Comme le parent est responsable des actes de ses enfants ou l’éditeur responsable de ses auteurs, ces derniers sont aussi responsables des sources auxquelles ils recourent, y compris de leur utilisation de GPT. 

La signature, gage de qualité et responsabilité… ou non

En peinture, l’artiste appose sa signature sur sa toile, indiquant sa paternité sur l’œuvre. De même, chaque mot que nous prononçons, chaque phrase que nous écrivons porte notre empreinte, agissant comme notre signature gravée à jamais dans la mémoire d’internet grâce à la plus grande archive du monde qu’est www.archive.org. C’est un gage de qualité pour certaines « marques », que celles-ci soient des auteurs confidentiels (Gauthier Dambreville) ou reconnus (Bernard-Henri Lévy), des titres (lemonde.fr), des infolettres (TimeToSignOff) ou des médias bien en place (TV5). Il peut aussi s’agir de médias célèbres pour leurs prises de parti (lecanardenchaine.fr) ou (liberation), voire des néo-médias YouTube.

Le système de partage sur les réseaux sociaux et de référencement par Google permet à ces médias de proliférer quelle que soit la qualité de leur travail ou l’objectivité de leur production. Ainsi, un large spectre d’idées se retrouvent amplifiées et propagées. Parmi tous ces signaux, beaucoup contiendront de plus en plus de sections générées par GPT. 

La question devient alors « à qui faire confiance ? » et « qui lire ? » dans ce monde où prolifèrera le spectre rampant d’un GPT à chaque ligne. 

Un label ? 

Je déteste l’idée de ces labels qui permettent aux consommateurs de s’acheter une bonne conscience. Est-ce vraiment utile de créer un label « Sans GPT » alors qu’il suffit de le mentionner dans la signature de l’article ? Alors qu’il est difficile de savoir si des enfants ont ou non participé à la production d’aliments (par exemple dans les plantations de cacao), il est en revanche facile de se rendre compte de la qualité d’un texte. Il est donc bien plus simple que les clients se fassent leur propre opinion sur la qualité du média qu’ils consomment. L’authenticité ou la qualité sont des valeurs que chacun peut ressentir. En tant que lecteur du Peuple, vous y êtes très certainement sensibles.

Darwinisme des médias

Prendre du contenu généré par GPT et le publier avec une faible relecture ou vérification sera un jeu dangereux. Cela devrait théoriquement anéantir les titres les moins scrupuleux en raison du départ de leur audience. Ce serait être naïf d’imaginer que le darwinisme s’appliquerait ainsi aussi simplement dans le monde des médias. Malheureusement, personne ne peut prédire ce qui adviendra. En effet, les nouveaux enjeux ne concernent pas uniquement la qualité des contenus. Il y a, entre autres, la force des logos ou « marques » (tels Le MondeLibération), mais aussi la force des personnalités qui contribuent régulièrement auprès de ces titres. Bref, il se pourrait bien que les médias se retrouvent dans un fonctionnement hybride avec des auteurs connus pour avoir quelques références et conservant ainsi un attrait pour leur audience. Et que, pour le reste, des contenus purement informatifs et simples soient développés par des fermes de pigistes GPTistes qui seraient là pour donner de la chair autour du backbone central d’auteurs et de personnalités à succès.

Seul l’avenir nous dira ce qui se passera. Et Le Peuple, journal engagé dans la réinformation, vous informera avec plaisir des dernières tendances afin que vous puissiez mieux comprendre ce qui se déroulera dans l’arène médiatique.  

Jean-Pierre Seyne

Rédigé sans AI